Le quotidien d'une médecin dans un désert médical

"J'ai 1900 patients. La moyenne nationale, c'est 800 par médecin." Amélie est médecin généraliste à La Loupe dans l'un des départements de France qui en comptent le moins, l'Eure-et-Loir. Aujourd'hui, elle est en grève parce que son quotidien, c'est ça.

“Je me dis que je ne vais pas pouvoir gérer tout le monde”


Il y a 22 médecins qui sont partis dans l'agglomération de Chartres en 2022, pour deux installations. Donc clairement, ils ne vont pas pouvoir remplacer les 22 médecins partis.” Amélie Ricois est médecin généraliste en Eure-et-Loir, l’un des départements qui comptent le moins de professionnels de santé. À elle seule, Amélie compte pas moins de 1900 patients, alors que la moyenne nationale est de 800. “Chaque jour, j'ai 1900 patients qui peuvent m'appeler parce qu'ils ont un problème de santé qui nécessite d'être vu.”
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“J'ai juste une envie, c'est de faire autre chose”


“Alors, moi, je suis fière d’être médecin, parce que, je ne vais pas le cacher, j’en ai quand même chié pendant mes études. Mais je ne sais pas si on doit être fier de réussir à travailler dans ces conditions-là, parce qu’en fait, on accepte ce qui est inacceptable”, pense-t-elle. “Ça fait pas 10 ans que je suis installée et en fait, j'ai juste une envie, c'est de faire autre chose, quoi.”
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La médecin réserve 15 créneaux par jour pour pouvoir traiter les urgences. Pourtant, ce n’est pas suffisant. “Par exemple, le 12 décembre, j’ai compté, il y a eu 46 appels pour des demandes de rendez-vous d’urgence le jour-même. Là, j’ai qu’une envie, c’est d’éteindre l’ordinateur et de rentrer chez moi, parce que je me dis que je ne vais pas pouvoir gérer tout le monde. Du coup, on passe en situation d’urgence, c’est la guerre, et je prie pour que tous ceux que je n’ai pas vus ou que je ne pourrai pas voir aillent bien.”
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“J’essaie de tout faire pour ne pas être la prochaine à partir”


Les patients se rendent bien compte de la charge de travail du corps médical. “Son prédécesseur, une fois, nous a reçus, il n’était pas moins de minuit, le soir, avec les rendez-vous, et il y avait eu des urgences entre les deux. Je croyais qu’il avait terminé, et je lui ai dit: ‘Bonne soirée, docteur.’ Il m’a dit: ‘Mais je dois encore passer à l’hôpital avant de rentrer chez moi’”, explique une patiente.
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Amélie Ricois essaye, autant que possible, de tenir malgré cette situation des professionnels de santé. “Aujourd’hui, je vois plein de collègues qui sont à genoux, qui ne peuvent plus, qui se mettent en arrêt de travail et qui ne retourneront jamais faire le travail qu’ils aimaient et pour qui ça avait un sens, et je me dis: ‘Houlà! Il ne faut pas que je sois la prochaine!’ Voilà. J’essaie de tout faire pour ne pas être la prochaine.”
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