Le bibimbap du chef Pierre Sang - Ce plat, c'est l'histoire de ma vie

Né en Corée du Sud, il a grandi en France après avoir été adopté à 7 ans. Son histoire, le chef Pierre Sang la raconte dans sa cuisine, notamment dans son bibimbap. Voilà pourquoi ce plat lui est si personnel...

Le chef Pierre Sang revisite le bimbimbap à la sauce auvergnate


Il mélange les influences de Corée, son pays d’origine, avec la tradition de France, sa patrie d’adoption. Le chef cuisinier Pierre Sang nous livre les secrets de sa cuisine.


Pierre Sang est arrivé en France à l’âge de 7 ans et demi. Il a grandi en Auvergne, avec les recettes de sa grand-mère. Puis il est retourné en Corée, d’où il ramené la recette du bimbimbap. Pour Brut, il raconte son histoire.


Des lentilles dans le bimbimbap


J’atterris à l’aéroport Charles-de-Gaulle. Neuf heures d’avion, pas faim, je ne sais pas parler français, je ne comprends rien, et je vois une pomme. Je me dis : « Putain, je suis content, enfin un produit que je connais. » Pourtant, quand je croque dans cette pomme, je me dis qu'il y a un problème, parce que les pommes coréennes ont toutes le même aspect, mais celle-là, quand on la goûte, son goût est totalement différent. Je comprends alors, sans même parler français, que je suis dans un autre pays.


Le riz du bibimpab est un peu spécial chez moi, tout simplement parce que je rajoute des lentilles vertes du Puy. C’est un produit que j’affectionne énormément parce que j’ai grandi autour des champs de lentilles. J’ai été adopté en Auvergne, en Haute-Loire, à Lantriac. Dans cette région-là, on produit beaucoup de lentilles vertes du Puy. Pour le riz, j'utilise une technique un peu asiatique, le « fried rice », autrement dit le riz poêlé.


C’est rigolo, quand j’étais jeune, je ne comprenais pas pourquoi les gens aimaient la lentille. Je ne comprenais pas, parce que j’en mangeais pratiquement tous les jours. Et au fur et à mesure, avec le temps, j’ai appris à l’aimer. J’allais en manger chez ma grand-mère. Pour moi, le goût de la lentille, c’est celle qui a été cuite dans un bouillon avec beaucoup de beurre, une pointe d’aïl, du thym et du laurier, et un peu de persil. 


Le kimchi, sa première claque


Je n’avais que 21 ans quand je suis retourné en Corée, parce que je n’étais pas prêt. Ma première claque - je n’avais jamais mangé dans un restaurant coréen, j’ai grandi à la campagne - ça a été le kimchi. C’est le légume national. C’est un peu comme notre baguette-beurre, ou le cornichon. C’est un légume fermenté. Ça a été mariné dans du gros sel, fermenté avec du piment, de l’aïl, un peu de sauce anchois et une base de purée de riz.


J’ai eu beaucoup de mal au début , parce que tout le monde me parlait du kimchi. C’est là que je me suis rendu compte que j’étais vraiment français, parce que j’avais beaucoup de mal avec ce goût fermenté. Et au fur et à mesure, j’ai appris à l’apprivoiser, et je me suis rendu compte qu’une partie de moi, de ma mentalité, c’était la Corée, que j’avais toujours voulu « ignorer ».


Il y a un autre produit que j’affectionne et que j’ai toujours vu quand j’étais gamin : la poitrine d’agneau. Pour rappeler mes notes d’enfance, je rajoute de la verveine du Puy. La verveine, c’est une plante verte qu’on utilise pour faire des infusions, des digestifs. Là, je veux que dans l’assiette, les gens retrouvent tous les éléments qui représentent mon univers. Je trouve que c'est un plat qui me ressemble, parce que, malgré mes yeux asiatiques, mes yeux bridés, ça raconte une autre histoire.


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Brut.