Rougeole : en RDC, 20 enfants meurent chaque jour

Pendant ce temps-là, en République démocratique du Congo, chaque jour, une vingtaine d'enfants décèdent de la pire épidémie de rougeole au monde.

En RDC, l’épidémie de rougeole a fait 6.000 morts depuis janvier 2019


310.000 personnes ont été contaminées. 75 % des décès concernent des enfants de moins de 5 ans. Dans ce pays aux territoires isolés, mener des campagnes de vaccination est très difficile.


Chaque jour, en Républoque démocratique du Congo (RDC), près d’une vingtaine d’enfants décèdent à cause de l’épidémie de rougeole. « Une personne infectée va pouvoir en infecter une vingtaine. À titre de comparaison, Ebola, ce sera deux. Pour le Covid-19, deux ou trois », indique Emmanuel Grellety, épidémiologiste pour Médecins sans frontières (MSF).


La rougeole est une maladie infectieuse parmi les plus contagieuses


Dans les centres de traitement de la rougeole, les ONG s’organisent pour tenter de sauver les familles de l’épidémie, comme Phemba et ses deux filles. « Les deux enfants ont été hospitalisées dans deux centres de santé. La prise en charge n’était pas adéquate. Elles ont été admises le 19 décembre. Malheureusement, on en a perdu une », déplore le Dr Ousmane Ousseini, médecin MSF à Matadi.


Depuis janvier 2019 selon l’OMS, 310.000 personnes ont été contaminées par la rougeole en RDC. 6.000 en sont mortes. Parmi elles, 75 % d’enfants de moins de 5 ans, les plus vulnérables face à la maladie. La rougeole est une maladie infectieuse parmi les plus contagieuses. C’est l’une des plus grandes causes de mortalité dans le monde. Elle se manifeste par une forte fièvre, un écoulement nasal, un mal de gorge, une conjonctivite, puis une éruption de plaques sur le corps et autour des lèvres.


Il n’existe aucun traitement spécifique


Il n’existe aucun traitement spécifique pour la rougeole, uniquement des traitements symptomatiques. La plupart des décès sont dus aux complications de la maladie : infections respiratoires aiguës, déshydratation, diarrhées, etc. « Quand l’enfant arrive rapidement après les premiers symptômes, on arrive à le soigner, on lui donne des médicaments, on lui fait un suivi, et il retourne à la maison. Mais quand le cas est compliqué, qu’il y a d’autres pathologies comme le paludisme, la malnutrition, des complications respiratoires, là, il faut aller vite et hospitaliser en urgence », détaille Roland Fourcaud, coordinateur de projets à MSF.


Pris en charge à temps, les patients guérissent une dizaine de jours après l’apparition des premiers symptômes. « La plupart arrivent avec des détresses respiratoires. Il faut prendre des décisions immédiates avec les médecins de réanimation. Nous sommes là pour détecter les complications. D’un côté, nous soignons, nous prévenons ces complications immédiatement, et de l’autre, en isolant les patients, on casse la courbe épidémiologique », ajoute le Dr Jean-Paul Kasolwa Haraka.


Mener une grande campagne de vaccination est quasi-impossible


La vaccination est aujourd’hui la seule mesure de prévention efficace contre la rougeole. Problème : en RDC, les conflits, la difficulté d’accès aux villages isolés et les inégalités écartent de nombreux enfants des campagnes de vaccination annuelles. « Ça demande beaucoup, beaucoup de moyens pour acheminer les vaccins jusqu’au point où il y a les enfants à vacciner, sachant que ça demande une chaîne de froid, donc des glacières. Qui dit glacières dit frigos, qui dit frigos dit générateurs, qui dit générateurs dit fioul, carburant… Et souvent, on se trouve dans des zones de santé qui ont très, très peu de moyens pour organiser leurs vaccinations de routine », explique Pierre Heddegem, coordinateur de l’équipe d’urgence rougeole.


Une campagne mondiale de financement a permis de vacciner en urgence des millions d’enfants en RDC. Mais l’ONU appelle à débloquer davantage de moyens pour maîtriser l’épidémie. « 27,5 millions de dollars ont été rassemblés pour cette campagne. Cependant, on estime que 40,8 millions supplémentaires sont nécessaires pour la mener à bien et renforcer le contrôle des maladies, la gestion et la communication », a annoncé le porte-parole de l’ONU, Stéphane Dujarric.


« On n’a jamais vu une épidémie d’une telle ampleur sur les 10 dernières années »


« Si on en est arrivé là, c’est parce qu’il y a un taux d’accumulation des personnes sensibles, c’est-à-dire non vaccinées, note Emmanuel Grellety. *Tous les ans, on fait face à des pics de grande ampleur. Mais on n’a jamais vu une épidémie d’une telle ampleur sur les 10 dernières années. Depuis la déclaration de l’épidémie, en juin 2019, on a lancé des activités de vaccination supplémentaires, on a vacciné près de 18 millions d’enfants de 6 à 59 mois. »


Pourtant, l’épidémie est loin d’être maîtrisée, affirme l’épidémiologiste. « Le risque de propagation reste très élevé. Donc on cherche encore à faire des vaccinations de rattrapage, de riposte. Pour arrêter la circulation du virus, il faudrait atteindre une couverture supérieure à 95 %. En RDC, un pays quatre fois plus grand que la France, avec plus de 85 millions d’habitants, les défis sont colossaux. »


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