Un jour avec Hatik

"Donne-toi les moyens de ton ambition. Ça sert à rien de baisser la tête." Il est le héros de la série "Validé", et il vient d'obtenir son premier disque d'or avec sa mixtape "Chaise pliante". Brut a passé un jour avec Hatik.

Un jour avec Hatik


Brut suivi le rappeur dans sa ville natale, Guyancourt. Il nous a parlé petits boulots, boxe, violences policières… et disque d’or.


Vous l’avez peut-être aperçu dans la série de Franck Gastambide, Validé, sortie sur Canal+ pendant le confinement. Il y incarne Clément, alias Apash, un jeune rappeur qui perce de manière inattendue. Si vous ne le saviez pas encore, le Apash de Validé est également rappeur dans la vie. Son nom de scène, c’est Hatik, et il vient de sortir une réédition de sa mixtape Chaise Pliante II.


Sa mixtape « Chaise pliante » certifiée disque d’or


« Quand je me préparais à ce casting, j'étais en mode taf, studio, trois heures de sommeil par nuit, j’allais au sport. Et quand même, j'arrivais au casting, et je connaissais tous mes textes ! » s’amuse le rappeur. Pour Brut, il a accepté de faire une visite privée de l’endroit où il a grandi, Guyancourt.


« Je ne suis pas un bon rappeur à la base. Mais par contre j'ai toujours été plus déterminé que beaucoup de gens je pense », constate Hatik. Même s’il a percé aujourd’hui – sa mixtape Chaise pliante a été certifiée disque d’or en juin – il n’oublie pas d’où il vient. C’est donc tout logiquement qu’il nous emmène aux Garennes, dans son quartier.


« Il y a eu beaucoup de galères parce que la musique n’est pas une science exacte »


Là, vers 2007, il a commencé à rapper. « Il y a eu beaucoup de galères parce que la musique n’est pas une science exacte. J'ai arrêté le rap parce qu'à un moment donné, j'étais dans un moment de ma vie où il y a eu pas mal de choses qui se sont passées, au niveau personnel, relationnel, amical… J'étais pas dégoûté de la vie, mais un peu quand même. »


Mais Hatik a fini par se relever. « La motivation, elle n'est pas dure à trouver. Tout dépend de l'amour que tu portes à ce que tu fais. Pour le coup, la musique, j'ai ça dans le sang, c'est un truc qui est vraiment ancré dans mon quotidien depuis des années. Ça fait un peu prétentieux de dire ça, mais j'ai vraiment l'impression, au fond de moi, que ce n'est pas dur de faire les choses quand t'es passionné. »


« Mes vacances à moi, c'était d'aller au studio »


À l’époque, le jeune garçon a un loyer à payer et refuse que ses parents l’aident financièrement. « Donc j'ai taffé, j'ai taffé, j'ai taffé… J'ai fait serveur, j'ai fait vendeur à Decathlon… J'étais livreur de pizzas, j'ai fait des burgers à Quick. Parfois, je faisais des semaines de 70 heures. » Pendant des années, il ne prend pas de vacances. Mais Hatik refuse de se lamenter sur son sort : ce rythme effréné était un choix de vie. « Mes vacances à moi, c'était d'aller au studio. »


Pendant tout ce temps, il reste à Guyancourt, réputé « quartier difficile ». Ici, les relations avec la police sont tendues. « Je ne suis pas de ceux qui vont te dire : "Mort aux porcs, tous les keufs méritent qu'on les caillasse", pas du tout. Par contre, une chose est sûre, c'est qu'à partir du moment où ils décident de nous mettre dans le même lot, en disant "ouais, les Noirs et les Arabes" - et ce n'est pas tous les keufs – tu ne peux pas t'étonner que dans l'autre sens, il y ait le retour de bâton. »


Un « jeu du chat et de la souris malsain » avec la police


Hatik évoque notamment un « jeu du chat et de la souris malsain » entre les jeunes de quartier et la police. « C'est genre : "Ah, lui on le connaît depuis qu'il est petit. Depuis qu'il est petit il nous fait chier. Là, si on a un moyen de lui faire mal, on va lui faire mal. De toute façon on est protégés, on est assermentés. Et puis en vrai, de toute façon, personne ne va nous filmer, et même si on filme, on est tranquilles." »


Pour lui, si des noms comme ceux d’Adama, de Zyed et de Bouna sont aujourd’hui présents dans esprits, ils ne représentent qu’une partie infime des jeunes issus de milieux défavorisés violentés par les forces de l’ordre. « Dans ce quartier, y a des gens qui se sont fait tabasser, frère. Moi, je l'ai subi, et hamdoulah, j'avais les moyens, via mes parents, d'avoir un avocat qui n'était pas trop pourri. Mais en vrai, sinon ? Combien il y a de gens qui subissent des violences policières et qui finissent des fois au shtar alors qu'ils se sont fait taper par les keufs ? »


« Ça ne sert à rien de baisser la tête »


Depuis plusieurs années, pour se défouler, Hatik pratique la boxe. Un excellent moyen de se débarrasser de ses tensions, selon lui. « Mon rapport à la boxe ? Ben c'est un rapport de bien-être. Parce qu'à chaque fois que tu vas donner un coup dans un sac ou dans un pao, c'est comme si t'enlèves des problèmes, des tensions musculaires, des tensions nerveuses. »


Maintenant qu’il a percé, il conseille aux jeunes qui souhaiteraient se lancer dans le rap d’être conscients de leur valeur et de ne jamais renoncer. « Donne toi les moyens de ton ambition. Et surtout, arrête… Ça ne sert à rien de baisser la tête. Baisser la tête, ça ne sert à rien, ça n'a jamais rien apporté. »


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