Brut a appelé le numéro vert du site IVG.net

Tenter de dissuader une femme d'avorter, c'est un délit. Et pourtant, voilà ce qui arrive quand on appelle le numéro vert d'IVG(.)net, l'un des sites les mieux référencés quand on veut s'informer sur l'IVG…

Ce qu’il y a derrière le numéro vert du site IVG.net


Brut a contacté le numéro vert d’information du site IVG.net. Trouvées en quelques clics sur internet, ces coordonnées ont mené la journaliste, Laurène Gris, vers une interlocutrice au discours biaisé.


« Sur le coup, vous allez être soulagée, vous allez être dans les bras de votre chéri, il va vous faire des câlins, mais ça, on s’en fiche. Ce qui est important, c’est l’après. Comment vous allez vivre ça, le soir, à la nuit tombée, les cauchemars, la nuit, etc.. Le matin, lorsque vous verrez un bébé dans une poussette. » Voici les mots adressés à Laurène Gris, journaliste pour Brut, lorsqu’elle a appelé le numéro vert indiqué sur le site IVG.net en se faisant passer pour une femme désireuse d’avorter.


« Je pense que c’est une bêtise »


« C’est en voyant l’échographie que vous allez savoir la différence entre votre raison, votre cœur et vos émotions », a poursuivi l’intervenante d’IVG.net. Et d’ajouter « Je pense que c’est une bêtise (de ne pas regarder l’échographie, NDLR). Moi, je m’occupe beaucoup des femmes en post-IVG. Vous faites ce que vous voulez, vous êtes complètement libre, je vous donne mon avis. »


Ce numéro vert existe depuis 2008. Il y aussi une page Facebook associée qui compte plus de 100.000 abonnés. On y trouve de nombreux témoignages de femmes qui disent regretter d’avoir subi une IVG. Malgré les promesses d’anonymat et de neutralité données par les sites comme IVG.net, le discours n’est pas neutre.


Ce que dit la loi


En 2017, IVG.net et d’autres sites similaires étaient déjà dans le viseur du gouvernement. Ce dernier a donc proposé un texte de loi visant à étendre le délit d’entrave à l’IVG au numérique. Ce texte a, depuis, été voté. Désormais, diffuser en ligne des informations biaisées sur l’avortement ou dissuader une femme de recourir à une IVG est un délit.


C’est Laurence Rossignol, ancienne ministre des Droits des femmes, qui a porté la loi. Laurène Gris l’a rencontrée et lui a fait écouter son enregistrement. « Il y a une frontière qui a été posée par la loi, la frontière consiste à dire qu’il est interdit de faire des allégations mensongères dans le but de dissuader une femme de recourir à l’IVG. On s’est rendu compte que la loi avait eu un effet dissuasif incontestable », assure Laurence Rossignol.


Depuis cette législation, les organismes de ce type ne tiennent plus de discours mensongers pour dissuader les femmes de recourir à l’IVG. En revanche, ils insistent beaucoup sur de potentielles conséquences psychologiques.


Un numéro vert géré par le Planning familial


Dans un mail, Marie Philippe, fondatrice du site IVG.net affirme : « Nous sensibilisons les femmes de façon complète sur l’IVG et les sensibilisons sur les conséquences possibles de l’IVG. Notre motivation n’est pas religieuse ; elle consiste à agir pour le respect de la femme dans son être intégral car trop souvent, l’IVG est un droit des femmes… utilisé pour les hommes ! Nous sommes pour un ‘nouveau féminisme’ qui prend en compte la personne tout entière de la femme et ses désirs profonds. »


En 2015, le gouvernement a créé son propre numéro vert, confié au Planning familial. Cette association historique de 60 ans s’est battue et continue de se battre pour les droits des femmes, notamment pour le droit à l’avortement.


« Ce numéro est essentiel parce que ce n’est pas si simple de pousser la porte d’un Planning familial et de pouvoir parler d’avortement. Pendant le confinement, le numéro vert a beaucoup été appelé parce qu’on a eu une inquiétude assez rapide à ce sujet-là. Et les femmes s’excusaient d’appeler. Ça montre bien qu’il y a toujours cette culpabilité, cette peur de déranger », déplore Sarah Durocher, coprésidente du planning familial.


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