Otage du Bataclan, David Fritz Goeppinger raconte

Le 13 novembre 2015, David faisait partie des otages du Bataclan. Marqué à vie, il raconte.

David Fritz Goeppinger, survivant du Bataclan et marqué à vie


Le 13 novembre 2015, David Fritz Goeppinger est au Bataclan. Il fait partie des otages des terroristes. Il est marqué à vie par ce drame. Pour Brut, il témoigne.


Cette nuit, il ne l’oubliera jamais. David Fritz Goeppinger est un survivant. Le 13 novembre 2015, il était au Bataclan lors de l'attentat. Cet événement l’a marqué à vie. David se rappelle du début de l’attentat : « J’entends des bruits métalliques qui viennent du rez-de-chaussée, sans trop comprendre et en même temps sans trop réaliser ce qui se passe. » Il voit des images qui ne partiront jamais et sent des odeurs qui lui resteront pour toujours, celles du sang et de la poudre.


Le récit de la prise d’otage


« Pour nous, la vie s'arrête à ce moment-là. On est vraiment un objet, on est réduit à notre plus simple personne : des êtres humains. On sait qu'à l'extérieur il y a bien des tas de choses qui se passent, que la vie continue, qu'il y a une espèce de train qui ne s'arrêtera pas, qui est en train de tourner à l’extérieur », raconte David Fritz Goeppinger. À ce moment-là, il est tenu en otage par l’un des terroristes.


Il se rappelle du lancement des échanges entre des négociateurs de la BRI et un terroriste. Pendant 2h30, David reste dans l’incompréhension. Il cherche une justification à ce qui lui arrive mais n’en trouve aucune. Peu après minuit, l’assaut au Bataclan est finalement donné par la BRI. Les otages sont libérés et les autorités les dirigent vers la sortie.


« Je me souviens descendre les escaliers et voir deux femmes qui s'enlacent et mon esprit refuse de comprendre. Je me dis : "Putain, elles dorment !" Et en fait, elles dorment les yeux ouverts, elles sont mortes quoi. Et l’opérateur, juste après cette scène, de dire : "Ne regardez pas !" Et je lève les yeux et en fait, derrière lui, il y a cette espèce d’amoncellement de cadavres. Moi, je vois ça et je tombe dans les pommes. C'est comme s'il y avait eu un second traumatisme dans le traumatisme. Je me suis dit : "Putain, je viens de passer 2h30 avec les mecs qui ont fait ça et moi, je peux marcher et j'arrive à sortir de là. »


L’après Bataclan


Dans les semaines qui suivent l’attentat, il est très compliqué pour David Fritz Goeppinger de retourner dans des lieux de fête. Entendre du rock est une épreuve pour lui. Pourtant, il est barman, il travaille dans un cadre festif. « C’était extrêmement difficile de me dire : "Putain, je vais retourner dans un bar, je vais retourner faire la fête !" Parce que quand on est barman, on participe à la fête, on l'alimente d'une certaine façon. Et pour moi, la fête s'était éteinte. Il y avait une espèce de fin le 13 novembre. »


En février 2016, David s’envole vers le Chili, son pays natal, pour tenter de se reconstruire. « J’arrive dans le parc national de la Torres del Paine, en Patagonie chilienne, et je me retrouve au milieu de nulle part, tout seul. L'énorme boulet de souffrance et de douleur qui me suit me rattrape à 100 % et me heurte complètement. Je me rappelle être dans ma tente, à 13.500 km de Paris, et je me dit : "Mais qu'est-ce que je fous là ?" Je vis vraiment ces deux semaines comme comme une espèce de long couloir de souffrances où j'ai besoin de Doris [sa petite-amie, NDLR]. Je l'appelle mais en même temps, ça ne capte pas, on a du mal à se parler, je n'ai pas Internet. C'est la cata et en même temps, ça me permet de me purger. Quand j'arrive en France, je sais que je suis peut-être prêt à reprendre quelque chose. Et ce quelque chose, c'est mon quotidien », se souvient-il.


David Fritz Goeppinger suit trois années de thérapie avec sa psychologue, Sandrine. Il décrit le mois d’avril 2018 comme le moment où il réussit à faire face à ses traumatismes. Selon lui, c’est grâce à Sandrine : « Elle m'a donné tous les outils nécessaires pour combattre le traumatisme, pour combattre les surgissements de ces images difficiles. Il me restera des douleurs, mais ce sera beaucoup moins dur qu'avant et j'aurai la force et la conviction de me dire que je suis plus fort que ça et que j'arriverai à le combattre. »


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