Le quotidien de Loïc Liber, victime de Mohamed Merah

Le 15 mars 2012, le terroriste Mohamed Merah tire sur trois militaires : Abel Chennouf, 25 ans, Mohamed Legouad, 23 ans et Loïc Liber, 27 ans. Seul Loïc a survécu. Depuis, il est tétraplégique. Brut l'a rencontré.

Loïc Liber, victime du terroriste Mohamed Merah


Le 15 mars 2012, le terroriste Mohamed Merah tire sur trois militaires : Abel Chennouf, 25 ans, Mohamed Legouad, 23 ans et Loïc Liber, 27 ans. Seul Loïc a survécu. Il est aujourd’hui tétraplégique.


« J'arrangeais mon uniforme, mon treillis. Sans rien comprendre, j'ai rien senti, j'ai pas entendu de détonation, ni de coups de feu. Quand je me suis réveillé à l'hôpital, mes camarades m'ont simplement que j'étais l'un des premiers parce que j'étais le plus grand. Comme il m'a pris pour mort, il ne m'a pas retiré dessus », se souvient Loïc Liber. Le militaire s’est fait tirer dessus par le terroriste Mohamed Merah le 15 mars 2012. Ses collègues, Abel Chennouf, et Mohamed Legouad, ne s’en sont pas sortis.


« J’ai pris deux balles : une qui a traversé les deux jambes et l'autre directement au cou. Par contre, mes camarades, eux, ils n'ont pas eu cette chance parce que ils ont essayé de s'échapper. Malheureusement, il a continué à tirer sur eux », poursuit Loïc Liber. Aujourd’hui, il est tétraplégique. Depuis le 17 juin 2014, Loïc est soigné et vit à l’Institution Nationale des Invalides, à Paris. Brut l’a recontré.


« J'ai essayé de bouger, je n'y arrivais pas »


À mon réveil, j'ai vu l'ancien Président de la République, Nicolas Sarkozy, qui m'a regardé et qui m'a dit : « Est-ce que vous savez qui je suis, jeune homme ? » Mais avec la morphine, je l'ai regardé dans les yeux, j'ai juste secoué la tête et je me suis rendormi. À mon réveil, j'ai cru que c'était un cauchemar. Quand j'ai vraiment ouvert les yeux, j'ai vu ma mère devant moi. Elle m'a tenu la main, elle m'a dit de garder mon sang-froid.


Au moment où elle m'a dit tout ça, j'ai essayé de bouger, je n'y arrivais pas. Alors je lui ai dit : « Qu'est ce qui se passe ? » C'est là qu'elle m'a dit : « Mon fils, c'est un terroriste qui t'a tiré dessus à Montauban devant le régiment. » Je me préoccupais plus de savoir si j'allais pouvoir me mettre debout que de ma respiration. Je ne savais même pas, à l'époque, que j'avais le nerf sectionné. J’avais l'impression de suffoquer comme quelqu'un qui ne sait pas nager.


« Est-ce que je continue comme ça, c'est ce que je veux ? »


À certains moments, je ne voulais pas vivre, je ne voulais plus vivre. Je me pose parfois la question, même maintenant : « Est-ce que je continue comme ça, c'est ce que je veux ? » Pour l'instant, je m'accroche, je me bats chaque jour. C'est dur, c'est très dur de voir que chaque jour, quand je me réveille, quand je regarde mon corps qui ne bouge pas, c'est horrible.


Mes journées, c'est simple. Il y a des moments où l'après-midi, je vais faire du vélo à l'aide d'une machine au cercle sportif. Sinon, je suis plutôt sur Internet parce qu'à l'heure actuelle, la domotique a fait énormément d'efforts avec mon fauteuil électrique. Je peux aller sur mes mails, mettre un film ou sortir.


« Je me bats pour montrer que je suis encore là »


Ma famille est aux Antilles. Ils viennent quand ils peuvent, soit tous les quatre mois, soit tous les trois mois. Ça dépend. Si je respirais tout seul, je serais déjà parti. Mais là depuis que je suis arrivé ici et depuis que c'est arrivé je ne les vois pas souvent, mes amis… mes meilleurs amis qui sont là-bas, je ne les vois pas, ils me manquent… Je me retrouve tout seul ici.


Je veux construire un projet de vie. Je veux avoir au moins un foyer, une maison, trouver quelque chose, un endroit où vivre tranquillement. Parce que je suis aux Invalides. Même en étant tétraplégique, j'ai envie aussi d'avoir une maison quelque part, de me sentir chez moi, d’avoir mon intimité. C'est pour ça que je me bats pour montrer que je suis encore là, c'est comme ça que j'étais, c'est comme ça que je suis.


Les photos, ça me rappelle moi auparavant, même si je ne le suis plus. Je suis quand même fier de ce que j'étais auparavant et c'est pour ça que je me bats aussi pour montrer que je suis encore là.


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Brut.