Des moines bouddhistes à nouveau empêtrés dans un scandale au chantage sexuel

Crédit : thongchainak / Adobe Stock
Un nouveau scandale sexuel impliquant des moines bouddhistes a éclaté en Thaïlande cette semaine, révélant le train de vie luxueux de certains dignitaires religieux et choquant la population pour qui le bouddhisme occupe une place centrale.
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La police thaïlandaise a arrêté cette semaine près de Bangkok une femme de 35 ans surnommée "Golf", accusée d'avoir eu des relations sexuelles avec au moins 11 moines et de les avoir menacés de diffuser des preuves de leurs ébats en échange d'argent.

Les enquêteurs ont retrouvé la trace de versements estimés à 385 millions de bahts (10 millions d'euros) ces trois dernières années, ainsi qu'environ 80.000 photos et vidéos qui auraient servi au chantage.

Cette affaire a révélé au grand jour le train de vie jugé luxueux et débauché de certains dignitaires de l'église bouddhiste, qui ont pourtant fait voeux de chasteté et de mener une vie modeste sur le plan matériel.

Le bouddhisme occupe une place prépondérante dans la société thaïlandaise. Il n'est pas rare qu'un Thaïlandais fasse des offrandes aux temples en signe de gratitude ou pour s'offrir une certaine protection spirituelle, ou soit ordonné comme moine pendant quelques jours.

Mais l'opacité persiste autour de l'usage que font les moines de l'argent reçu de la part des croyants, ni de leur indemnité perçue de l'Etat, qui n'est pas imposable. 

Ces dernières années, plusieurs dignitaires ont été arrêtés pour avoir détourné des millions d'euros. 

Des affaires liées à la consommation de drogues dans les temples ont aussi défrayé la chronique.

Le roi Maha Vajiralongkorn a révoqué plus de 80 moines en lien avec l'affaire du chantage sexuel, critiquant "un comportement inapproprié qui a provoqué la détresse du peuple thaïlandais".

Onze autres religieux ont été défroqués, dont le responsable d'un important temple de Bangkok, afin de "restaurer la confiance du public", selon l'Office national pour le bouddhisme.

Un moine thaïlandais soupçonné d'avoir détourné des dons pour des jeux en ligne

"Enseignements du Bouddha"

Les scandales à répétition ont "ébranlé les gens au plus profond d'eux-mêmes", explique Danai Preechapermprasit, un spécialiste du bouddhisme.

"La population s'interroge si les donations sont utilisées à des fins spirituelles ou pour des désirs personnels", poursuit-il. "Je pense que la Thaïlande a atteint un point où il est devenu difficile pour des moines de marcher dans la rue."

L'expert indépendant en bouddhisme Jaturong Jongarsa estime pour sa part que les temples ne sont "plus considérés comme les lieux sacrés qu'ils étaient autrefois".

Les familles ont tendance à envoyer des personnes LGBT+ ou en proie à des problèmes de drogues dans des temples assimilés à des "dépotoirs" qui peuvent les "corriger", décrit-il.

Mongkol Sudathip, un moto-taxi de la capitale Bangkok interrogés par l'AFP confirme ne plus être "impliqué dans la religion comme j'en avais l'habitude".

"Je n'ai plus un respect total" pour l'institution, assure cet homme de 33 ans, qui préfère donner aux hôpitaux ou aux écoles pour enfants défavorisés, plutôt qu'aux temples.

Camphun Parimiphut, un agent de sécurité de 52 ans, de la province de Maha Sarakham (nord-est) évite également de donner de l'argent aux moines, préférant leur offrir de la nourriture.

Pour autant, le bouddhisme conserve un aspect sacré pour de nombreux Thaïlandais qui s'efforcent à suivre les paroles du Bouddha au quotidien.

"Le bouddhisme, ce sont les enseignements, pas les individus qui échouent à les suivre", insiste Maha Sarakham. "On peut perdre la foi dans les moines", "mais pas dans les enseignements du Bouddha", dit-il.

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