"Le manque de moyens humains et les dysfonctionnements" dans ces investigations "constituent une faute lourde et engagent à ce titre la responsabilité de l'État", précise le tribunal, le condamnant à payer 50.000 euros au père de la fillette, Eric Mouzin, au titre de son préjudice moral.
"On est contents de la décision", a réagi l'avocat d'Eric Mouzin, Me Didier Seban, auprès de l'AFP.
"Les mots sont durs et je pense qu'on peut espérer que les leçons seront tirées pour d'autres disparitions d'enfants", a-t-il ajouté.
"Amateurisme"
Éric Mouzin avait assigné l'État, fustigeant à l'audience en juin un "amateurisme" dans l'enquête sur la disparition de sa fille, âgée de 9 ans quand elle avait disparu en 2003 alors qu'elle rentrait de l'école à Guermantes (Seine-et-Marne).
Au début de l'enquête, la piste Michel Fourniret est un temps suivie avant d'être abandonnée. Ce n'est qu'en 2020 que la juge Sabine Khéris réussit à faire reconnaître à ce tueur en série son rôle dans la mort de la fillette.
Dans sa décision, le tribunal a relevé la "cotation tardive et peu intelligible" dans cette enquête. Pendant neuf ans, le dossier n'était pas coté (système de classement des différentes pièces du dossier qui permet de les répertorier). Ce n'est qu'en 2012 que la partie civile a pu avoir un accès complet à la procédure.
Le tribunal estime également que "la succession de dix magistrats instructeurs, dont certains pour de très courtes périodes de quelques mois" a participé "à la difficulté d'appréhender un dossier d'instruction d'une telle ampleur".
Le corps pas retrouvé
Condamné à la perpétuité incompressible pour les meurtres de sept jeunes femmes ou adolescentes entre 1987 et 2001, Michel Fourniret est mort en 2021, sans avoir été jugé pour la disparition d'Estelle Mouzin, dont le corps n'a pas été retrouvé.
L'instruction de deux décennies a mené à la condamnation en décembre 2023 de Monique Olivier à la réclusion criminelle à perpétuité, assortie d'une période de sûreté de 20 ans, pour sa complicité dans trois enlèvements et meurtres commis par son ex-mari Michel Fourniret, dont celui d'Estelle Mouzin.
Le tribunal a en revanche débouté Éric Mouzin de sa demande d'indemnisation fondée sur un préjudice matériel.
Il demandait 150.000 euros au titre des préjudices matériel et financier et 200.000 euros pour le préjudice moral.