Les raisons du renvoi de Gérard Depardieu en procès pour viols

Crédit : Chesnot/Getty Images
Vidéosurveillance, "déclarations fluctuantes" de Gérard Depardieu, "contrainte morale" sur la comédienne Charlotte Arnould alors qu'il avait "toute connaissance" de son opposition. Voici pourquoi une juge d'instruction a renvoyé en procès pour viols cette figure du cinéma français, selon des éléments obtenus mardi par l'AFP.
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Quels sont les faits ?

Le 27 août 2018, Charlotte Arnould dépose plainte contre Gérard Depardieu dans une gendarmerie du sud de la France.

Les 7 et 13 août, elle s'était rendue dans l'hôtel particulier de l'acteur, qu'elle connaît depuis son enfance, pour répéter de manière informelle un texte de théâtre, et dit s'être fait imposer plusieurs pénétrations digitales.

Gérard Depardieu renvoyé en procès pour viols devant la cour criminelle départementale de Paris

Charlotte Arnould, plaignante constante

Selon des éléments de l'ordonnance de mise en accusation du 28 août, la magistrate instructrice estime que dès sa plainte, Charlotte Arnould a fait "des déclarations claires et précises" sur les faits, "maintenues lors des confrontations" avec l'acteur.

La juge d'instruction rappelle que ni le psychologue ni le psychiatre "n'ont émis de réserve sur la crédibilité des déclarations" de la plaignante et met à son crédit son "comportement" constant: "dès le 7 août, en sortant de chez le mis en examen, elle a alerté sa mère en pleurant" et averti des proches.

Avant de décider de porter plainte, elle a aussi fait un examen gynécologique corroborant ses accusations, note la juge, qui relève que Charlotte Arnould, fragile psychologiquement, et attaquée frontalement par l'avocat de Gérard Depardieu, Jérémie Assous, "ne tire aucun avantage" de cette procédure.

Les "déclarations fluctuantes" de Gérard Depardieu

La juge demande le procès de Gérard Depardieu devant la cour criminelle départementale de Paris pour des viols commis par "contrainte morale résultant d'un état de sidération ayant empêché Charlotte Arnould de protester et de s'enfuir".

L'acteur a tenu selon la magistrate instructrice des "déclarations fluctuantes", notamment sur la pénétration digitale.

"À aucun moment", dit-elle, il "ne s'est assuré de l'accord volontaire et explicite" de cette jeune femme anorexique, "abusant de (sa) vulnérabilité". Il a "commis les faits en toute connaissance du non-consentement de Charlotte Arnould".

La "contrainte morale" s'explique aussi, d'après l'ordonnance, par "l'ascendant naturel de Gérard Depardieu lié à son âge, sa notoriété, sa posture sociale, au fait qu'il avait connu (Charlotte Arnould lorsqu'elle était) enfant".

La juge d'instruction relève aussi sa "conception très personnelle (...) des relations qu'il peut avoir avec des femmes en situation d'infériorité".

Gérard Depardieu a fait appel de sa condamnation en mai à Paris pour des agressions sexuelles sur le tournage en 2021 du film "Les volets verts", un dossier qui présente d'après la juge des "similitudes" avec celui de Charlotte Arnould.

Au cours de l'enquête, il a semblé lui-même s'interroger sur l'accord de Charlotte Arnould, indiquant notamment lors d'une confrontation : "Avec le recul, je peux penser qu'elle n'était pas consentante". 

Selon la juge, l'acteur, âgé alors de 69 ans, contre 22 pour la comédienne, "avait conscience de l'incongruité de la situation" et a même évoqué une "gêne". 

Gérard Depardieu déclaré coupable d'agression sexuelle

Les deux rendez-vous et la vidéosurveillance

La défense de Gérard Depardieu a avancé que le retour de Charlotte Arnould à l'hôtel particulier de l'acteur le 13 août, six jours après le premier viol dénoncé, démontrerait que les accusations sont fausses, quand celle-ci a justifié ce second rendez-vous par sa volonté de "dire toutes ses vérités" à l'acteur.

Élément central du dossier, les images de vidéosurveillance démontrent selon la juge d'instruction qu'au second rendez-vous, la comédienne "garde ses distances", vêtue d'une veste et d'un pantalon contre un mini-short le 7 août.

Selon la magistrate, ces images ont "confirmé la description et le séquençage des faits tels que relatés par la partie civile alors même que celle-ci, lors de ses premières auditions, ignorait l’existence d’enregistrements". Elles ont aussi attesté de son "attitude soumise", "comme pétrifiée", tandis que Gérard Depardieu "prenait toutes les initiatives sexuelles".

Que dit le comédien ?Ni le comédien, ni son entourage n'ont commenté mardi cette décision, susceptible d'appel.

"Jamais au grand jamais, je n'ai abusé d'une femme", avait dit l'acteur en octobre 2023, soutenant que Charlotte Arnould serait venue "de son plein gré dans (sa) chambre".

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