Le tribunal judiciaire de Paris a estimé que TotalEnergies, quatrième groupe pétrogazier occidental, avait commis des "pratiques commerciales trompeuses" en communiquant sur son "ambition d'atteindre la neutralité carbone" et "d’être un acteur majeur dans la transition énergétique", donnant ainsi raison partiellement aux ONG Greenpeace France, Les Amis de la Terre France et Notre Affaire à Tous qui avaient saisi au civil le tribunal en 2022.
Il s'agit de facto de la première condamnation pour greenwashing, ou écoblanchiment, d'une compagnie pétrolière dans le monde pour la façon dont elle présente ses engagements climatiques, dit à l'AFP l'ONG ClientEarth qui suit de près la jurisprudence contre l'industrie pétrolière et gazière.
Greenpeace s'est félicitée auprès de l'AFP d'"un précédent juridique majeur contre la désinformation climatique des majors pétrolières".
"C’est la première fois à travers le monde qu’une major pétrogazière est condamnée par la justice pour avoir trompé le public en verdissant son image au sujet de sa contribution à la lutte contre le changement climatique", a déclaré l'ONG plaignante.
"Cesser la diffusion de la communication trompeuse"
Les associations avaient épinglé une quarantaine de messages dans la campagne de communication du groupe déployée à partir de mai 2021 sur son site internet, dans la presse, sur les réseaux sociaux et à la télévision.
A l'époque, Total venait de se rebaptiser TotalEnergies pour souligner son ambition d'être "la compagnie de toutes les énergies", du pétrole à l'électricité éolienne et solaire.
Le groupe affichait alors son objectif de "neutralité carbone d'ici 2050, ensemble avec la société" et vantait le gaz comme "l'énergie fossile la moins émettrice de gaz à effet de serre", malgré son bilan climatique contesté en raison des fuites de méthane, très réchauffant pour l'atmosphère.
Le tribunal de Paris a estimé que la société TotalEnergies avait fait état d'allégations environnementales qui "étaient susceptibles d’altérer le comportement d’achat du consommateur" et de "l'induire en erreur" en lui faisant croire qu'elle pouvait atteindre la "neutralité carbone" en 2050 tout en augmentant la production de pétrole et de gaz, selon un communiqué.
Le tribunal a ordonné au groupe "de cesser la diffusion de la communication trompeuse, alloué des dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi par les associations demanderesses et prévu une mesure de publication du dispositif de la décision sur le site commercial du groupe", selon le communiqué.
En revanche, il a débouté les associations sur leurs demandes concernant les allégations environnementales de TotalEnergies qu'elles jugeaient exagérées concernant le gaz et les agro-carburants. Le tribunal estime que de tels messages ne pouvaient être considérées comme des publicités adressées au consommateur "en relation directe avec la promotion, la vente ou la fourniture des énergies de la société TE aux consommateurs".