"Nous sommes certaines de (sa) culpabilité", a ajouté la magistrate, car dans ce dossier, "tout désigne Frédéric Péchier et seulement Frédéric Péchier. Il est le seul dénominateur commun pour tous les actes" malveillants recensés, a encore souligné l'une des deux représentantes du parquet.
L'accusé de 53 ans, qui n'a cessé de clamer son innocence, est jugé depuis trois mois à Besançon pour avoir empoisonné 30 patients au bloc opératoire, dont 12 sont morts, entre 2008 et 2017.
"Rien ne relève du hasard. Tout ramène" à l'accusé, "que ce soit les règles physiques de la science ou les statistiques", a renchéri l'autre représentante du parquet, Christine de Curraize. "Non seulement c'est le crime parfait, mais c'est aussi le crime le plus diabolique qui soit", qui "nous plonge dans l'indicible, dans la noirceur de l'être humain", car "on n'attend pas le crime derrière le soin", a-t-elle relevé.
"Tutoyer Dieu"
Pour elle, Frédéric Péchier est "sans contexte l'un des plus grand criminels de l'histoire judiciaire française". "Quand vous avez au bout de votre seringue le pouvoir de tuer, cela peut vous donner le frisson de toute puissance et de tutoyer Dieu", a-t-elle insisté, fustigeant "un mode opératoire redoutable et hautement pervers".
Selon l'accusation, Frédéric Péchier a pollué des poches de perfusion avec du potassium, des anesthésiques locaux, de l'adrénaline ou encore de l'héparine, pour provoquer l'arrêt cardiaque de patients pris en charge par d'autres médecins anesthésistes et ainsi leur nuire par ricochet.
Dans cette "affaire totalement hors norme", marqué par "le tabou social du meurtre médical", l'accusé "n'est évidemment ni Guy Georges, ni Michel Fourniret, il n'en est pas moins un tueur en série", a martelé Thérèse Brunisso.
"Zone de guerre à la clinique"
Après avoir soutenu pendant l'enquête que la plupart des cas étaient dus à des "erreurs médicales" de ses collègues ou à des aléas thérapeutiques, Frédéric Péchier a admis que parmi les 30 cas qui lui sont imputés, 12 étaient des empoisonnements, dont cinq mortels. Mais il l'a répété: ce criminel en blouse blanche, ce n'est pas lui.
Dans ce "dossier complètement dingue", "les doutes qui me tiraillaient (...) se sont levés les uns après les autres et sa culpabilité est devenue une évidence", a martelé Christine de Curraize, qui a suivi ce dossier depuis le début de l'"enquête titanesque", ouverte en janvier 2017.
Pendant ces deux jours consacrés aux réquisitions du ministère public, "nous détaillerons chacun de ces faits et nous vous donnerons aussi une vision d'ensemble", a promis Thérèse Brunisso.
La magistrate s'est efforcée de contrer deux arguments souvent brandis par la défense. D'abord qu'il n'y aurait pas de preuves dans ce dossier. C'est "faux", "nous avons tout un faisceau d'éléments qui conduisent" à l'accusé et "uniquement" à lui, a-t-elle relevé, soulignant que "des zones d'ombre, il y en a dans toutes les affaires criminelles. À de rare exceptions près, on n'a jamais de témoins directs des crimes".
Il est "faux" également d'affirmer qu'"il faut être un fou furieux pour faire ça", car "la maladie mentale, la folie, ce n'est pas nécessaire pour caractériser un tueur en série", et "ce sont les faits qui déterminent la culpabilité", a-t-elle insisté.
Pour elle, Frédéric Péchier, par son "utilisation perverse du métier d'anesthésiste", a voulu "créer sa propre zone de guerre à la clinique", pour "provoquer la mort". "On ne peut pas imaginer" qu'il ait "tué à 12 reprises sans le vouloir", a-t-elle insisté.
Pour l'avocat de la défense, Randall Schwerdorffer, qui plaidera l'acquittement à partir de lundi, le mobile d'une vengeance envers des collègues pour des motifs futiles ne tient pas.
L'accusé, qui comparaît libre, encourt la réclusion à perpétuité. Le verdict est attendu d'ici au 19 décembre.








