Quinze ans requis contre un ex-policier de la brigade des mineurs jugé pour viol d'enfants philippins

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Quinze ans de prison ont été réclamés jeudi contre un ex-policier de la brigade des mineurs de Marseille jugé pour le viol de deux enfants des rues de Manille et la détention de milliers de fichiers pédopornographiques.
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"C’est le loup qui est dans la bergerie et c'est une trahison de ses proches et de la société", a estimé l'avocate générale Sylvaine Schumacher, sollicitant au passage un suivi socio-judiciaire de dix ans à compter de sa libération avec obligation de soins. 

"Avec ce profil diagnostiqué de pédophilie et de mythomanie, on est très loin d'avoir atteint le bout du cheminement qu'il a à faire et il faut le mettre à l’épreuve", a considéré la magistrate devant la cour criminelle des Bouches-du-Rhône qui juge Julien Palisca depuis lundi.

Elle a aussi demandé à la cour de prononcer une série d'interdictions, définitives pour toute fonction professionnelle ou bénévole en contact avec des mineurs et pour l'exercice de la profession de policier et, durant cinq ans, pour l’interdiction de quitter la France.

"Condamnez-moi lourdement mais laissez-moi tranquille !"

Comme tous les acteurs de ce procès, Mme Schumacher a dit s'être heurtée à "la question pressante de qui est Julien Palisca ?". Elle a pris l’image d’"un Dr Jekyll décrit pas ses collègues comme solaire" et "sa face cachée de Mister Hyde qui a dupé beaucoup de monde jusqu'à ce que son collègue Christophe Annunziata démasque l'imposteur".

Regrettant des aveux à minima, l'avocate générale, à l'instar des avocats des parties civiles, l'a décrit comme "dans le calcul". "Il est capable de détecter ce que son interlocuteur attend de lui et il dit les choses parce qu'il pense qu'on a envie de les entendre", a résumé l'avocate générale. 

"Vous plaidez coupable quand on vous colle l’évidence sous les yeux", avait lancé avant elle Maître Joanny Moulin, avocat de l'association d'Enfance et Partage. Maître Baptiste Bellet, avocat de la Fondation pour l'Enfance a déploré que ses explications aient été très maigres, résumant sa posture à un : "je plaide coupable. Condamnez-moi lourdement. J’irai consulter des psychiatres mais laissez-moi tranquille !"

"j'ai besoin de soins"

La carapace de cet homme de 46 ans s'est tout juste fendillée au cours des quatre jours d'audience même face aux dépositions, à 11 000 km de là, des deux frères âgés de 11 et 15 ans qu'il avait violés et agressés sexuellement en septembre 2018 à Manille. 

Sa reconnaissance des faits a été bien en deçà du récit fait par les deux victimes entendues en visio conférence auprès de qui il s'est excusé. 

"Leurs déclarations sont contextualisées, sans calcul et les détails donnés me font dire qu’elles ne sont pas faites à légère", a estimé Mme Schumacher. L'avocate des victimes, Maître Julie Bolo-Jolly a dénoncé ce tourisme sexuel : "On ne va pas aux Philippines par hasard quand, avant de partir on a tapé dans la barre de recherche de son ordinateur +prostitution Manille+".

Maître Justine Boyadjian, l'avocate de Julien Palisca, a tenté d'adoucir ce portrait, rappelant que "son passé d'enfant abusé l’a poursuivi toute sa vie". 

Durant l'audience, elle avait souligné qu'en dépit des alertes et même lorsque l'enquête avait débuté, l'ex-policier n'avait pas effacé les milliers de fichiers pédopornographiques de ses téléphones ni les notes très compromettantes rédigées à Manille, faisant le récit des viols des deux victimes. 

Auparavant, le mis en cause avait évoqué "un besoin de soins" : "à la maison d’arrêt, je suis pris en charge. En liberté, je ne suis pas sûr tant que j’aurais pas mis en place un suivi".

Dans ce procès qui a aussi donné lieu aux questionnements sur l'inertie de la hiérarchie et l’aveuglement de certains au sein de la brigade des mineurs, l'avocate générale a assuré "partager la colère" de Christophe Annunziata, le binôme de l'accusé qui l’a démasqué.  

"Autant on ne peut pas leur reprocher de ne pas avoir décrypté l'impensable, mais des choses ont été mal gérées et des dysfonctionnements sont importants". 

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