Budget : à l'Assemblée nationale, le Parti socialiste et La France insoumise se déchirent

Gettyimages
Alors que l'Assemblée examine le budget de la sécurité sociale, plusieurs amendements ont divisé la gauche. Cette fracture devrait s'élargir un peu plus lors du vote, mercredi prochain, sur la suspension de la réforme des retraites.
À voir également sur Brut

Des rapports électriques dans l'Assemblée et à couteaux tirés sur les réseaux sociaux : la fracture entre le Parti socialiste et les Insoumis s'est accentuée au fil des débats budgétaires, comme devrait le montrer de manière spectaculaire le prochain vote sur la suspension de la réforme des retraites.

Samedi déjà, sur la partie "recettes" du budget de la Sécurité sociale, les gauches se sont divisées, le PS votant pour, et les Insoumis votant contre.

Le RN et LFI "ont fait le jeu du pire", a dénoncé le patron des socialistes, Olivier Faure. Le leader Insoumis Jean-Luc Mélenchon accusant, en retour, le PS d'avoir trahi la promesse faite aux électeurs du Nouveau Front populaire, leur alliance de 2024.

Suspension de la réforme des retraites

Le débat sur la suspension de la réforme des retraites aura lieu mercredi peu après 15h00, avec un vote prévu juste avant celui sur l'ensemble de ce budget, pour permettre au maximum de députés d'être présents.

Les socialistes, qui ont arraché de haute lutte cette mesure, une condition sine qua non de la non-censure du gouvernement de Sébastien Lecornu, voteront logiquement pour.

Les Insoumis ont eux annoncé qu'ils voteraient contre, comme en commission. "Valider le décalage de la réforme reviendrait à valider (...) le report à 64 ans de l'âge légal de la retraite", a affirmé la députée Ségolène Amiot.

Une ligne de partage qui divise aussi les syndicats, la CFDT ayant salué une "vraie victoire", quand la CGT fustige un "simple décalage" payé par les "retraités actuels et futurs".

Les communistes devraient eux majoritairement s'abstenir, position qui avait été celle des écologistes en commission.

"Vladimir Ilitch Brun"

Ce n'est loin s'en faut pas le seul sujet sur lesquels s'affrontent socialistes et Insoumis, multipliant les invectives dans l'hémicycle et les accusations de "mensonge" sur X.

Au début des débats sur le projet de loi de finances, LFI a vivement reproché au PS son abstention sur un amendement visant à créer un impôt universel ciblé, empêchant son adoption à une voix près.

Les débats se sont encore tendus lorsque les mélenchonistes ont voté pour un amendement de la droite - identique à l'un des leurs - indexant sur l'inflation l'ensemble des tranches du barème de l'impôt sur le revenu. Le PS proposait, lui, de valoriser seulement les tranches les plus basses.

Tension à son comble le 31 octobre, lors de l'adoption de la proposition de Jean-Paul Mattei (MoDem) remaniant l'Impôt sur la fortune immobilière, avec le soutien du PS et du RN, LFI ne se privant pas de dénoncer une alliance contre-nature.

Cette semaine, c'est durant l'examen du budget de la Sécurité sociale que les esprits se sont échauffés, lors du rejet d'un amendement de Jérôme Guedj (PS) augmentant la CSG sur les revenus du capital. Des amendements proches, déposés par LFI, le PS et les communistes, ont finalement été adoptés.

Le député Philippe Brun a vu rouge. "Jean-Luc Mélenchon ne défend plus les travailleurs, il défend le grand capital !", a-t-il accusé dans une interview au Point vendredi. "Vladimir Ilitch Brun, le guide suprême de la révolution prolétarienne", a ironisé sur X le coordinateur de LFI Manuel Bompard, en référence à Lénine.

"Bataille d'hégémonie"

Il y a un an, les quatre forces du NFP se félicitaient d'avoir bâti un "budget NFP-compatible" - finalement rejeté par l'Assemblée. Ce temps paraît désormais bien loin. Entre le PS et les Insoumis, les communistes et les écologistes s'efforcent d'éteindre les incendies.

Emmanuel Maurel (groupe GDR) et Sandrine Rousseau (groupe écologiste et social) notent qu'au-delà des poussées de fièvre, les votes de la gauche sont très souvent identiques. "Il y a un socle de valeurs communes très fortes", dit cette dernière.

Parlant à tous, le patron des députés GDR (communistes et ultra-marins), Stéphane Peu, "déplore les excès de langage d’un côté comme de l’autre".

S'il reconnait que la "stratégie" des socialistes est parfois "difficilement compréhensible" et que les "excès" des Insoumis "peuvent exaspérer", il estime toutefois que les positions des uns et des autres "n'invalident pas l'unité nécessaire" face à la poussée de l'extrême droite.

Sandrine Rousseau se montre moins optimiste : "on est dans une bataille de ligne et d'hégémonie", qui ne pourra être tranchée que par "les élections", estime-t-elle.

A voir aussi