Le déséquilibre en faveur des garçons dans les formations aux métiers d’ingénieurs et du numérique "prive les filles de débouchés vers des carrières souvent mieux rémunérées" mais aussi "freine la capacité de l’État à former suffisamment d’ingénieurs", juge les services de la ministre de l'Education dans un communiqué détaillant les huit mesures de ce plan "filles et maths".
Le premier "pilier" prévoit de "former et sensibiliser" aux biais de genre et aux stéréotypes dans l'apprentissage des mathématiques tous les professeurs dès la rentrée 2025, du primaire au lycée.
Les études montrent que le décrochage des filles commence dès le CP. "La société dans son ensemble fait inconsciemment une sorte de lobbying contre la présence des filles en sciences", a estimé sur franceinfo le mathématicien Hugo Duminil-Copin.
L'ex-première ministre, elle-même polytechnicienne, a assuré sur France Inter que "les filles ont moins confiance en elles (...). Elles lèvent moins la main quand on fait un cours de maths. Si on n'est pas attentif à ça, on interroge tout le temps les garçons et pas les filles".
"Et quand on regarde les appréciations, les filles, on leur dit qu'elles sont consciencieuses et les garçons qu'ils sont brillants", regrette Mme Borne.
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Classes aménagées
Le plan prévoit aussi l'expérimentation de classes scientifiques à horaires aménagés en 4e et 3e, avec un objectif de 50% de filles dans chacune.
"Ces dispositifs existent aujourd'hui pour la musique ou le théâtre", observe Mme Borne. "On va expérimenter dans cinq académies dès la rentrée et on veut généraliser, avec au moins une classe de ce type dans chaque département, à la rentrée suivante."
Ces classes permettraient, notamment grâce à la pédagogie de projets, "d'avoir des activités supplémentaires pour découvrir les sciences, les maths autrement avec des chercheurs, des partenaires", selon la ministre.
L'objectif global est que 30.000 filles de plus en 2030 choisissent la spécialité mathématiques en première et la conservent en terminale, soit 5.000 filles de plus par an à compter de la rentrée 2025.
Dans son rapport de 2023 sur l’invisibilisation des femmes dans le numérique, le Haut Conseil à l'égalité (HCE) avait préconisé d’imposer des quotas de 50% de filles dans les spécialités scientifiques (mathématiques, physique) et 30% minimum en NSI (numérique et sciences informatiques).
Aujourd’hui, 42% des filles suivent l'enseignement de spécialité mathématiques en terminale, mais elles ne sont plus que 25% des étudiants qui intègrent des formations supérieures conduisant aux métiers d’ingénieurs et du numérique. Une proportion qui "stagne depuis 20 ans", précise le ministère.
"Recyclage"
La ministre endosse par ailleurs "l'objectif" - elle n'utilise pas le terme quota - d'un rapport des inspections générales préconisant au moins 20% de filles dans chaque classe préparatoire scientifique en 2026 et 30% en 2030.
Tout en louant l'effort "indispensable" pour s'attaquer à ce "véritable problème d'inégalité filles-garçons", Sophie Vénétitay, secrétaire générale du syndicat Snes-FSU, qualifie auprès de l'AFP certaines mesures annoncées de "recyclage". "Combien de fois a-t-on eu des plans maths, des plans de formations de professeurs...?"
"Surtout, ne pas intégrer la réforme du lycée dans les causes des inégalités filles-garçons est la preuve d'un certain aveuglement", selon la syndicaliste.
Le gouvernement avait déjà prévu l'instauration d'une épreuve de mathématiques anticipée en classe de première pour la prochaine année scolaire pour tenter de renforcer le niveau au lycée.
La réintroduction d'un enseignement des mathématiques obligatoire à la rentrée 2023 pour tous les lycéens de la filière générale en première avait déjà soldé l'une des mesures les plus controversées de la réforme Blanquer du bac.
La dernière étude internationale TIMSS (Trends in International Mathematics and Science Study), publiée en décembre, a fait le constat que les élèves français en CM1 et en quatrième restent parmi les moins bons de l'Union européenne en maths et sciences, avec une hausse de l'écart entre filles et garçons en fin d'école élémentaire. Cet écart est le plus important des pays de l'UE.
Les élèves français toujours parmi les derniers de la classe en maths