L'extrême droite représentée par la formation Chega ("Assez"), qui continue de progresser à chaque scrutin, atteint pour la première fois la barre de 20% des voix et menace de dépasser le Parti socialiste (PS) en tant que principale force d'opposition.
D'après des résultats officiels quasi complets, le camp du gouvernement sortant - l'Alliance démocratique (AD) - a obtenu 32,7% des suffrages, contre 23,4% pour le PS et 22,6% pour Chega.
Sans compter les quatre mandats des circonscriptions de l'étranger, qui ne seront attribués que dans les prochains jours, la coalition sortante remporte 89 sièges sur un total de 230, bien en dessous du seuil de 116 élus synonyme de majorité absolue.
En sièges, socialistes et extrême droite se retrouvent pour l'instant à égalité, avec 58 députés chacun.
"Le peuple souhaite ce gouvernement. Le peuple souhaite ce Premier ministre", s'est félicité M. Montenegro dimanche soir, en promettant que son prochain exécutif sera "à la hauteur de la confiance renforcée qu'il a reçue des électeurs".
Cet avocat de 52 ans, qui a toujours refusé de gouverner avec le soutien de Chega, a été contraint de démissionner en mars sur fond de soupçons de conflit d'intérêts concernant les activités de sa société de conseil.
"Cordon sanitaire"
S'il a remporté le pari de s'en remettre au verdict des urnes pour assurer sa survie politique, ses gains sont insuffisants pour modifier de façon décisive le rapport de forces à l'Assemblée.
"Ce n'est pas clair s'il y aura une capacité à gouverner accrue si le cordon sanitaire est maintenu entre l'AD et Chega", a commenté à l'AFP la politologue Marina Costa Lobo, directrice de l'Institut des sciences sociales de l'Université de Lisbonne (ICS).
Selon cette analyste, "Chega est le grand vainqueur de la soirée" et la gauche a essuyé "une défaite de proportions historiques".
Le chef de l'opposition socialiste, Pedro Nuno Santos, a annoncé sa démission dès dimanche soir en demandant des "élections internes" auxquelles il ne se présentera pas.
"Luis Montenegro n'est pas idoine à exercer les fonctions de Premier ministre, et les élections n'ont pas changé cette réalité", a-t-il toutefois réaffirmé.
Le président de Chega, André Ventura, a lui assuré que "rien ne (serait) plus comme avant".
"Nous n'avons pas gagné ces élections, mais nous avons écrit une page d'histoire. (...) Le bipartisme au Portugal est terminé", a réagi ce juriste de 42 ans, qui s'est fait connaître comme truculent commentateur de football.
"Besoin d'immigrés"
En un an de gouvernement, l'exécutif de M. Montenegro a pris plusieurs mesures en faveur du pouvoir d'achat, en augmentant les retraites et le salaire minimum, ou en acceptant les revendications de plusieurs catégories de fonctionnaires, dont les enseignants, les médecins ou les policiers.
Il a par ailleurs durci la politique migratoire, qui était une des plus souples d'Europe sous le précédent gouvernement socialiste d'Antonio Costa.
Alors que le nombre d'étrangers vivant au Portugal a quadruplé entre 2017 et 2024, atteignant environ 15% de la population, sur 10 millions d'habitants au total, l'immigration a fait irruption dans le débat politique.
"Le pays a besoin d'immigrés, mais il n'est pas capable d'accueillir tous ceux qui arrivent", a estimé Tiago Manso, un économiste de 33 ans originaire du Brésil, qui a voté pour la première fois au Portugal.
Depuis sa fondation en 2019, Chega a connu une croissance fulgurante, obtenant en mars dernier 18% des voix pour passer de 12 à 50 députés.
Surfant sur les déboires du Premier ministre et l'afflux de travailleurs migrants d'Asie du Sud, son chef de file a martelé la rhétorique habituelle des partis populistes contre la corruption des élites politiques et les immigrés.