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Il a dirigé la République Tchèque et ses 10,9 millions d’habitants de 2017 à 2021. Andrej Babis, 71 ans, ambitionne aujourd’hui de reprendre les rênes du pays.
Samedi 4 octobre, son parti Ano a obtenu 34,51% des voix, soit 80 sièges sur 200 au Parlement selon les résultats définitifs. Mais il ne dispose pas de la majorité et devrait compter sur le soutien du parti d'extrême droite SPD, qui a obtenu 7,8% des voix, et du parti de droite "La Voix des automobilistes" (6,8%).
Mais qui est Andrej Babis ?
Né à Bratislava le 2 septembre 1954, Andrej Babis avait choisi la nationalité tchèque après la Révolution de Velours qui avait renversé le régime totalitaire en 1989, suivie de la division de la Tchécoslovaquie en deux.
Il doit depuis batailler avec son passé sous la dictature communiste. S'il a regretté de n'avoir "pas été aussi courageux que Vaclav Havel" - le célèbre opposant devenu chef d'Etat - et d'avoir adhéré au parti unique, il dément obstinément en avoir été un agent.
Conglomérat chimique et alimentaire
Parfaitement francophone, Andrej Babis a été scolarisé en Suisse et à Paris, où son père était diplomate, avant de vivre au Maroc après son diplôme d'économie.
Selon le magazine Forbes, il est à la tête de la septième fortune du pays, avec 3,9 milliards de dollars engrangés grâce à l'entreprise de production d'engrais Agrofert, créée en 1993 et devenue un important employeur privé. Il affirme avoir bâti sa fortune à la force du poignet: "Je travaille depuis l'âge de 15 ans. J'ai livré du lait, déchargé des colis à la gare, fait de la décoration".
Il avait aussi réussi à se constituer un empire médiatique avant d'être contraint de vendre ses participations dans plusieurs titres dont le deuxième quotidien, DNES.
Ce père de quatre enfants issus de deux mariages a également fondé en 2012 le mouvement fourre-tout “Action des citoyens mécontents” (ANO, "Oui" en tchèque).
"Trumpiste et pacifiste"
Hier s'affichant proche d'Emmanuel Macron et pro-européen, il se revendique désormais "trumpiste et pacifiste", refusant toute aide militaire à l'Ukraine.
L'an dernier, l'ancien communiste d'origine slovaque a co-fondé avec le Hongrois Viktor Orban le groupe parlementaire "Patriotes pour l'Europe", qui accueille des mouvements d'extrême droite, dont le Rassemblement national français.
Ce revirement remonte à sa défaite aux dernières législatives et à la présidentielle, qu'il attribue au "dénigrement" dont il a fait l'objet, et auquel les institutions européennes auraient participé.
Car les accusations de malversations le concernant sont tenaces. Depuis son entrée tardive en politique en 2011, ses adversaires lui reprochent de confondre les intérêts de la République tchèque avec ceux de son groupe chimique et alimentaire.
Poursuites judiciaires
Alors à la tête du ministère des Finances, il avait été mis en cause en 2017 après la fuite d'enregistrements prouvant qu'il avait exercé des pressions sur les journalistes, et il avait été poussé à la démission.
En 2021, le Parlement de Strasbourg qui a voté une résolution réclamant une loi pour éviter que des fonds communautaires ne lui profitent. La Commission a ensuite acté, dans un rapport, que sa double casquette -de Premier ministre et chef d'entreprise- avait compromis un "exercice impartial et objectif de ses fonctions".
Des manifestations massives ont eu lieu pendant son mandat et des poursuites judiciaires ont été lancées par le parquet.
Il est soupçonné d'avoir contribué à sortir de son conglomérat sa ferme, le "Nid de cigogne", pour qu'elle puisse bénéficier d'une subvention de l'UE de deux millions d'euros, destinée aux petites entreprises. Il doit être jugé pour fraude aux subventions européennes.
Il a toujours nié les allégations, dénonçant "une campagne de diffamation" aux motivations politiques.
Château sur la Côte d'Azur
Par ailleurs, la justice française a ouvert en 2022 une enquête pour blanchiment de fraude fiscale, concernant les conditions d'acquisition, via des sociétés offshore, d'un château pour 5 millions d'euros sur la Côte d'Azur. L'enquête est toujours en cours, selon une source judiciaire interrogée par l'AFP.
Aux dernières élections législatives, Andrej Babis a fait campagne sur la promesse d'augmenter les prestations sociales et de réduire l'aide apportée à l'Ukraine, pour faire passer les Tchèques d'abord. Il a été très présent sur le terrain, allant à la rencontre des habitants en t-shirt et sur TikTok.
Marine Le Pen, la dirigeante du Rassemblement national, a salué son score sur X, estimant que "partout en Europe, les partis patriotes sont appelés au pouvoir par les peuples, désireux de retrouver leur liberté et leur prospérité !".
Le SPD, son allié potentiel, réclame un référendum sur la sortie de l'Union européenne, ce que M. Babis a cependant catégoriquement rejeté.
