“Un tiers des femmes de France vivent en ruralité”. Soit 11 millions de citoyennes réparties sur 91,5 % du territoire national.
Ce lundi 8 décembre, l'association Rura et l’institut Terram publient les résultats de leur étude, "Ce que vivent (vraiment) les femmes rurales" sur les inégalités de genre en zone rurale. Le constat est implacable : la ruralité amplifie les inégalités entre les femmes et les hommes.
Voici quelques chiffres extraits de cette étude.
45% des femmes en milieu rural sont inactives
Dès l’orientation, les jeunes filles les plus modestes se voient dans l’obligation de demeurer dans leur commune ou ses environs. En effet, décohabiter a un coût que certaines familles ne peuvent supporter. "L'ambition scolaire des jeunes femmes s'accorde non pas au désir, mais au possible", note les auteurs.
Ainsi, si 32 % des femmes en milieu rural appartiennent aux catégories socioprofessionnelles inférieures et 23 % aux catégories socioprofessionnelles supérieures, 45 % d’entres elles sont inactives. Et ce n’est, la plupart du temps, pas par choix, mais "sous l’effet de carrières discontinues, de temps partiels subis et d’un marché du travail moins diversifié".
86,5 % des femmes rurales gèrent les démarches administratives du foyer
À cela s’ajoute un manque d'infrastructures : écoles, médecins, formations, services administratifs…
Hors des villes, chaque démarche requiert du temps, la possibilité de se déplacer en voiture, et de l’organisation. Ces coûts logistiques retombe en majorité sur les femmes car, comme en ville, elles sont celles qui réalisent la majeure partie des tâches domestiques.
Ainsi, 86,5 % des femmes rurales gèrent les démarches administratives du foyer, 70 % les trajets scolaires, 74 % les activités extrascolaires. "Ce qui, en ville, peut se mutualiser, se délègue rarement en ruralité", souligne l’étude.
38% estiment que leurs possibilités professionnelles sont limitées
Ces responsabilités familiales ont, logiquement, un impact sur leurs carrières. Les femmes rurales sont 38 % à estimer que celles-ci limitent leurs possibilités professionnelles, contre 17 % des hommes de leur territoire. L’écart, de 22 points, est nettement supérieur à celui observé en ville, à 16. Les auteurs de l’étude sont catégoriques : "La ruralité ne crée pas les écarts, elle les durcit."
53% des femmes rurales ne se sentent pas en sécurité économique
Plus d’une femme en milieu rural sur deux (53 %) déclare ne pas se sentir en sécurité économique. Si ce niveau est proche des femmes urbaines (50 %) il est nettement supérieur à celui des hommes ruraux (38 %).
Et parmi celles mariées, pacsées ou en concubinage, 69 % déclarent que ce sont les revenus de leur partenaire qui contribuent majoritairement aux revenus du couple. Soit 9 points de plus que leurs homologues urbaines (60 %).
47 % des femmes rurales ont moins de 5 heures de temps personnel par semaine
Aux inégalités économiques s'ajoute une inégalité de temps libre. Une femme rurale sur cinq (19 %) déclare avoir moins de deux heures par semaine pour elle-même, contre 7 % des hommes dans le même territoire. Mais c'est sous le seuil des cinq heures hebdomadaires que les écarts explosent : 47 % des femmes rurales ont moins de 5 heures pour elles, contre 25 % des hommes. C’est plus du double de l’écart observé chez les urbains.
47% des féminicides
Dernier constat mais pas des moindres, les territoires ruraux concentrent 47 % des féminicides pour un tiers des femmes. Mais seuls 26 % des appels au 3919 (la ligne d'écoute nationale destinée aux femmes victimes de violences) viennent des zones rurales. Ainsi, "la proximité sociale, l’absence d’anonymat et l'éloignement des structures de protection rendent le recours à l’aide plus coûteux, plus risqué, plus rare", note l'étude.
Face à ces constats, les auteurs émettent plusieurs propositions, comme la mise en place de transports à la demande, de micro-crèches et de services plus accessibles. Ils plaident ainsi pour une "conception universelle" ciblant les "utilisateurs extrêmes" : si une solution fonctionne pour une mère isolée dans la Creuse, elle sera efficace pour tout le monde.








