Raids sanglants à Rio : aucun des 117 morts ne figuraient parmi les suspects cités par les procureurs

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Sur les 117 personnes tuées par la police le 28 octobre dernier, aucune ne figurait parmi les 69 suspects cités par les procureurs dans la plainte qui a servi de base à la descente, révèle Reuters.
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Sur les 117 personnes tuées par la police le 28 octobre dernier, aucune ne figurait parmi les 69 suspects cités par les procureurs dans la plainte qui a servi de base à la descente, révèle Reuters.

Seules cinq des personnes citées ont été arrêtées ce jour-là, et aucune d'entre elles n'était un haut responsable du célèbre gang Comando Vermelho (Commando Rouge), selon une analyse par l'agence de presse américaine du rapport complet de police sur l'opération, communiqué à la Cour suprême brésilienne. Le Comando Vermelho est le principal groupe criminel de Rio, qui opère dans les favelas, quartiers populaires densément peuplés.

Le raid, baptisé "Opération Containment", a fait 121 morts, dont quatre policiers et deux adolescents, et 99 suspects ont été placés en détention. Après l'opération, les habitants ont aligné des dizaines de cadavres dans les rues.

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Le principal chef du gang, Edgar Alves de Andrade, connu sous le nom de Doca, est toujours en fuite. Un chef de gang, de niveau intermédiaire, a lui été arrêté sans qu'un seul coup de feu ne soit tiré, selon le rapport de police, examiné par Reuters.

280 000 personnes dans les favelas

Le secrétaire à la sécurité publique de Rio, Victor dos Santos, qui supervise la police, a confirmé à l'agence de presse américaine que l'objectif du gouvernement dans cette opération était d'arrêter les hommes qui avaient été inculpés. Mais, a-t-il ajouté, "il n'était pas très facile de rechercher 69 personnes parmi les 280 000" qui vivent dans les favelas visées par l'opération.

Bien que 19 des hommes tués n'aient pas eu de casier judiciaire, selon les documents de l'enquête, Santos a déclaré qu'il était certain à 100 % qu'ils étaient des criminels.

Il a fait valoir que le nombre de personnes tuées et arrêtées montrait que "la situation était bien pire que ce que l'enquête avait révélé" et que le raid impliquant 2 500 policiers "montrait que l'État détient le monopole de l'usage de la force". Il a ajouté que d'autres raids étaient prévus dans les mois à venir dans les favelas de Rio.

Critiques

Pourtant, les premiers résultats de la descente ont suscité les critiques des familles des victimes et des défenseurs des droits de l'homme, qui ont reproché à la police d'avoir tué sans discernement au lieu de poursuivre des objectifs clairs basés sur des enquêtes de longue haleine sur le gang Comando Vermelho.

Cette opération, qui a eu lieu une semaine avant l'arrivée des dirigeants mondiaux pour le sommet des Nations unies sur le climat COP30, a opposé le président de gauche, Luiz Inacio Lula da Silva, qui l'a qualifiée de désastreuse, aux conservateurs qui affirment qu'il s'agit d'un modèle pour lutter contre le crime organisé.

Alors que l'administration Lula a soutenu les opérations policières visant à perturber le financement du crime organisé, ses rivaux de droite, comme le gouverneur de Rio Claudio Castro, plaident en faveur de raids agressifs pour saisir les armes et arrêter ou tuer les membres de gangs, malgré le coût humain élevé.

Le Brésil a enregistré 44 127 décès violents intentionnels en 2024, soit une baisse de 5,4 % par rapport à l'année précédente, selon le Forum brésilien sur la sécurité publique. En 2024, 6 243 personnes ont été tuées par la police, soit une moyenne de 17 décès par jour.

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