Australie : une immense mine de charbon au cœur des débats

Des journalistes français arrêtés en Australie lors d'un reportage sur un projet qui agite le pays : la mine de Carmichael. Décryptage.

Australie : une immense mine de charbon au cœur des débats


Trois journalistes français arrêtés en Australie lors d'un reportage sur un projet minier controversé : la mine de charbon de Carmichael. Un sujet qui agite l'Australie depuis une décennie. Décryptage.


Des heurts entre manifestants et forces de l'ordre, des journalistes arrêtés et une bataille politique qui dure depuis plus de 10 ans… C'est un projet minier qui agite l'Australie. Situé au nord du pays, dans l'État du Queensland, le projet minier de Carmichael devrait être l'une des plus grandes mines de charbon au monde.


Avec 27,5 millions de tonnes de charbon extraites par an, le directeur de l'entreprise Adeni, propriétaire de la mine, prévoit la création de 1500 emplois directs et 6750 emplois indirects. Un argument de taille dans un État où le taux de chômage est supérieur à la moyenne australienne. « Cela nous assurerait du charbon pendant plus de 100 ans, ce charbon qui a profité aux Australiens et qui est compétitif d'un point de vue énergétique. Il a assuré la prospérité des entreprises australiennes et a permis à l'économie australienne de rester compétitive sur le marché mondial » a déclaré Scott Morison, Premier ministre australien, devant le Parlement australien, en février 2017.


Le 13 juin 2019, un accord de principe a été donné par l'État du Queensland pour la construction de la mine de charbon de Carmichael. Cette décision intervient quelques semaines après la victoire des conservateurs aux élections législatives, face aux travaillistes, plus sensibles aux problématiques environnementales.


Mais pour les opposants au projet, cette mine financée en partie par l'argent public ne serait pas viable économiquement et serait très néfaste pour l'environnement. « J'ai des amis et de la famille qui travaillent dans les mines dans le nord du Queensland et je comprends à 100 % leurs inquiétudes quant à l'arrêt du charbon, puisque c'est une industrie énorme ici. Mais je pense que la question (…) implique toute l’Australie » a déclaré Jeanne Santosa, opposante au projet.


Dans la région où la mine doit être construite, vivent plusieurs espèces dont les populations sont en déclin, comme le diamant à bavette. Les peuples aborigènes Wangan et Jagalingou, eux, dénoncent devant la justice une occupation illégale de leurs terres ancestrales. Mais en juillet 2019, le tribunal fédéral a rejeté leur recours.


Une étude d'impact réalisée en 2013 sur une première version du projet minier qui devait alors extraire 2,18 fois plus de charbon que le projet approuvé récemment par l'Etat, soulignait de nombreux points d’inquiétude pour l’environnement. 297 milliards de litres d'eau devaient être extraits de cours d'eau et d'autres réservoirs voisins, ce qui aurait entraîné une baisse du niveau des nappes phréatiques.


Autre inquiétude : les émissions de CO2 dues à l'activité minière. Selon l'étude d'impact de 2013, la première version du projet minier devait émettre 200 millions de tonnes de CO2 durant les 60 années d'exploitation. Ce chiffre prend en compte l’exploitation minière et le transport du charbon jusqu'au port, mais pas les émissions des centrales indiennes que ce charbon doit alimenter.


« On ne peut faire ça qu’en ignorant tous les écologistes, en ignorant le réchauffement climatique, la chute du cours du charbon et que l'ensemble de l'industrie du charbon est en déclin » a déclaré John Krey de la Bulga Progress Association.


Même si la production a été revue à la baisse, pour les militants, ce projet entre toujours en contradiction avec les engagements de l'Australie pris lors de la COP21. « Nous avons 12 ans pour atteindre la neutralité carbone. Si on n'y arrive pas, il sera trop tard pour stopper le changement climatique » a par exemple déclaré Alia Baveck, opposante au projet, lors d’une manifestation.


Cette usine pourrait faire augmenter de 10 à 20 % les exportations australiennes de charbon. Les émissions liées à cette exploitation pourraient aussi menacer l'un des joyaux de l'Australie : la Grande Barrière de corail.


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