Tri des déchets alimentaires : une loi applicable ?
Depuis le 1er janvier, le compostage des déchets alimentaires, comme les épluchures, est obligatoire en France. Pourtant, à Paris par exemple, très peu d’informations ont été données, et les poubelles de tri de déchets alimentaires sont peu nombreuses. Juliette Franquet, directrice de l’association Zero Waste France, nous explique. “Contrairement à ce qu'on entend aujourd'hui”, il n’y a pas d’obligation de composter ses déchets alimentaires chez soi en tant que particulier. “On voit des fausses informations circuler, jusqu'à dire qu'il y a des amendes pour une personne qui ne composterait pas ses biodéchets. C'est complètement faux”. “L'obligation, elle est vraiment sur les mairies. Depuis le 1er janvier, les mairies auraient dû mettre à disposition des outils, des bacs, des bio-seaux, un système de tri de leurs déchets Cela veut dire que quelqu'un qui habite à la campagne, une maison, il peut se fabriquer son compost ou demander à la mairie de l’aide, une formation au compost, etc.” déclare Juliette Franquet.
“Les biodéchets, c'est une solution simple, accessible et on n'y est pas du tout. C'est catastrophique”
“Dans les grandes villes, le plus pratique et ce dont on a absolument besoin, c'est d'avoir de la collecte de déchets. Ça veut dire soit une poubelle supplémentaire en bas de son immeuble, soit un point d'apport volontaire” ajoute la directrice de l’association Zero Waste France. Dans le 18e arrondissement de Paris par exemple, elle constate qu’il n’y a que cinq poubelles destinées aux déchets alimentaires. “Ce qui n'est pas énorme au vu du nombre d'habitants et de la densité de ce quartier. Donc on suppose que ce n'est pas vraiment accessible pour tout le monde”. Elle déplore également le manque d’informations fournies aux habitants des quartiers : “Les gens du voisinage, ils ne savent même pas où c’est. (...) Pour gérer les déchets, il ne suffit pas d'installer une poubelle. Il faut prévenir les personnes autour, leur expliquer pourquoi on le fait, tous les avantages environnementaux à trier ses déchets alimentaires, etc. Il ne faut pas que le tri des déchets, ce soit seulement pour les convaincus qui savent pourquoi ils le font. C’est absolument nécessaire que ce soit accessible à tout le monde.”
Dans un centre de tri de déchets (parfois surprenants)
‘Ils avaient huit ans et ils ont mis une petite poubelle à un croisement de rues sans prévenir les habitants autour. Donc forcément, les gens ne vont pas bien trier. Forcément, on va continuer à brûler des déchets, alors que si on s'y prend vraiment bien, les gens ne sont pas stupides et tout le monde peut faire un petit effort pour essayer de réduire les impacts colossaux de la gestion des déchets en France” affirme Juliette Franquet. Elle rappelle qu’en France, aujourd’hui, la plupart des déchets sont brûlés ou mis en décharge. “Quand on les brûle, ça veut dire que comme les biodéchets sont composés principalement d'eau, ça veut dire qu'on brûle de l'eau et quand on les met en décharge, c'est hyper polluant, notamment du méthane. Aujourd'hui, on est conscients de la crise écologique, du besoin de retour au sol, etc., et les biodéchets, c'est une solution simple, accessible et on n'y est pas du tout et c'est catastrophique.”
“Huit ans plus tard, on n'y est pas du tout. Et si les choses continuent telles qu'elles sont, on n'y sera jamais”
La directrice de l’association Zero Waste France préconise “d’abord, de mettre des bacs qui ne soient pas loin de chez soi, que ce soit dans la rue ou dans des cours ou dans des immeubles. Ce qu'il faut aussi, c'est informer la population. On ne peut pas juste mettre un bac et dire "les gens trient mal”. Il faut expliquer comment on le fait, où c'est, à quoi ça sert... Et les biodéchets, c'est vraiment un super exemple de comment on peut faire revenir à la terre des déchets. Ça sert à l'agriculture, ça a plein de vertus incroyables. Donc ce qu'il faut, c'est encore une fois mettre des moyens humains et financiers pour pouvoir accompagner cette transition.”
Comment réduire ses déchets ? Cette famille zéro déchet raconte
“Cette loi était très ambitieuse. En France, on a même été un peu précurseur parce qu'on a été avant une réglementation européenne. Huit ans plus tard, on n'y est pas du tout. Et si les choses continuent telles qu'elles sont, on n'y sera jamais. Donc ce qui est absolument primordial, c'est qu'aujourd'hui, les institutions publiques, et toutes les institutions publiques : mairies, les régions, l'État, mettent les moyens nécessaires pour adapter nos modes de vie sans que ce soit un sacrifice pour chaque citoyen de faire quinze minutes à pied pour aller trier ses déchets” conclut Juliette Franquet.