Après avoir évalué les plans énergie-climat de la plupart des Etats membres, Bruxelles table sur une baisse de 54% des émissions de gaz à effet de serre en 2030 par rapport à 1990, tout près de l'objectif de 55% visé dans l'UE.
"Nous devons maintenant nous appuyer sur cette dynamique", a réagi Wopke Hoekstra, le commissaire européen en charge du climat.
"Il s'agit d'un moment décisif: chaque secteur, dans chaque Etat membre, doit contribuer", a-t-il intimé.
Et les plans des 27 - des engagements sur le papier - doivent encore être concrétisés, martèlent les organisations environnementales.
"Sans politiques nationales efficaces et sans financement crédible, la mise en œuvre ne sera pas à la hauteur", a prévenu Giulia Nardi, du réseau d'ONG Climate Action Network.
Selon la Commission, l'Europe a déjà réduit de 37% ses émissions depuis 1990, dont 8% en 2023, et l'objectif 2030 est à portée de main.
Bruxelles relève toutefois des disparités entre Etats membres et réclame des efforts supplémentaires pour réduire la consommation d'énergie.
Le réchauffement climatique, l'ingrédient qui a amplifié les désastres naturels en 2024
Sont soulignées aussi les difficultés en matière de protection des forêts et de séquestration du carbone.
Cette "faiblesse de nos puits de carbone, conséquence de la détérioration de nos forêts est inquiétante et il faut y remédier au plus vite", a averti l'eurodéputé centriste Pascal Canfin (Renew), tout en saluant la "bonne nouvelle" des estimations globales en 2030.
Autre motif de satisfaction pour la Commission, la plupart des pays membres se sont alignés sur son objectif d'une part de 42,5% d'énergies renouvelables dans la consommation totale d'ici 2030.
Avec une mauvaise élève du point de vue de Bruxelles, la France, même si Paris ne cesse de défendre son énergie nucléaire "décarbonée".
Trois Etats - la Belgique, l'Estonie et la Pologne - sont pointés du doigt pour n'avoir pas encore remis leurs plans énergie-climat actualisés (Pniec). Ils "doivent le faire sans délai", a exhorté la Commission.
Après le satisfecit pour 2030, le plus dur reste à faire sur la route de la neutralité climatique promise par l'Union européenne en 2050.
Virage "pro-business"
Car les Vingt-Sept vont d'abord devoir s'accorder sur l'étape intermédiaire de 2040, et les négociations piétinent.
Il y a plus d'un an, la Commission recommandait une baisse de 90% des émissions de CO2 en 2040 par rapport à 1990 au sein de l'UE. Depuis, elle n'a jamais osé mettre formellement la proposition sur la table.
Car certains jugent l'objectif inaccessible. D'autres comme la France ne cachent pas leur scepticisme et demandent des garanties sur la décarbonation de l'industrie.
Embarrassée, la Commission européenne pourrait envisager des flexibilités dans son mode de calcul en 2040, peut-être grâce à l'achat de crédits carbone sur les marchés internationaux.
L'exécutif européen promet de soumettre une proposition avant l'été, et assure que l'UE sera prête pour la prochaine conférence de l'ONU sur le climat (COP30) en novembre au Brésil.
Mais ces atermoiements inquiètent les écologistes, qui espéraient une mobilisation européenne après le retrait des Etats-Unis de Donald Trump de l'accord de Paris sur le climat.
Et les ONG s'alarment d'un détricotage en règle du Pacte vert, le fameux "Green Deal" adopté lors du précédent mandat d'Ursula von der Leyen.
Confrontée à la concurrence chinoise et aux menaces douanières de M. Trump, l'Union européenne a en effet entamé un virage pro-business ces derniers mois.
Report de la loi contre la déforestation, suspense sur l'avenir d'un texte consacré à la "vigilance" environnementale des multinationales... : Bruxelles entend réviser une série de lois, au nom de la lutte contre la "bureaucratie".
Et le contexte a changé au sein des 27 avec la montée de l'extrême droite.
La socialiste espagnole Teresa Ribera, vice-présidente de la Commission en charge de la Transition propre, a peiné à se faire entendre jusqu'ici.
Avec les résultats du jour, l'Europe vient de "prouver que des objectifs fiables et prévisibles, fondés sur des données scientifiques, ainsi qu'une réglementation adéquate, sont efficaces", a-t-elle insisté mercredi.
Signe de l'urgence, l'ONU estime que le réchauffement moyen de la planète sur la période 2025-2029 devrait dépasser de plus de 1,5°C les niveaux préindustriels.