"Pas de passage en force": sur la Nouvelle-Calédonie, la ministre Naïma Moutchou prône le dialogue

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À peine sortie de sa première bataille parlementaire, la nouvelle ministre des Outre-mer Naïma Moutchou promet qu'"il n'y aura pas de passage en force" sur le dossier calédonien et assure que l'accord de Bougival "peut être complété".
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"Je suis persuadée qu'il y a un chemin: Bougival a posé des fondations intéressantes. C'est un accord qui a ravivé l'espoir", a expliqué la ministre des Outre-mer, Naïma Moutchou, à l'AFP.

Signé en juillet entre l'État, les non-indépendantistes et les indépendantistes, le projet d'accord de Bougival prévoit la création d'un "Etat de Nouvelle-Calédonie" inscrit dans la Constitution française. Mais depuis le FLNKS, principale alliance indépendantiste, a retiré sa signature.

Pour Naïma Moutchou, ce retrait "ne signifie pas qu'il n'y a plus de dialogue". "Il n'y aura pas de passage en force. Il y aura toujours des négociations: c'est la seule voie possible", insiste la ministre.

"Si le consensus le permet, on pourra, en temps voulu, préciser la question de l'autodétermination, qui demeure (...) un droit imprescriptible. Rien ne doit être exclu du débat: discutons-en sereinement", ajoute-t-elle. Elle se rendra sur l'archipel du Pacifique à partir du 1er novembre.

Selon elle, "il y a des possibilités de +bougé+" et "on ne peut pas ne pas le tenter". Mais la crise économique et sociale qui frappe le Caillou depuis les émeutes de mai 2024 exige aussi des réponses concrètes.

"En me rendant sur place, je pense que j'entendrai d'abord des revendications sur le fait qu'il n'y a pas de transport, que les gens n'ont pas de travail", estime-t-elle.

Pour elle, les dispositifs actuels "ressemblent d'avantage à un catalogue de mesures qu'à une stratégie cohérente".

"Un grand plan Marshall de l'économie, il n'y en a pas eu", regrette la ministre, qui dit vouloir "poser à plat" la stratégie économique du territoire.

Un ministère sous pression

À peine nommée, Naïma Moutchou a plongé dans un agenda dense. Ancienne députée Horizons et vice-présidente de l'Assemblée nationale, cette avocate de formation hérite d'un ministère exposé, entre tensions institutionnelles et urgences sociales.

"Je veux travailler avec les élus, car je les connais: j'étais députée, je sais qu'eux sont les mieux placés pour défendre leur territoire".

Première épreuve: la bataille parlementaire autour du report des élections provinciales, après un barrage d'amendements porté par LFI. Pour le contourner, les défenseurs du texte ont organisé le rejet préalable de la proposition de loi, qui en conséquence devrait être adoptée lundi en commission mixte paritaire.

Mardi, le projet de loi sur la vie chère dans les outre-mer, préparé par son prédécesseur Manuel Valls, arrivera au Sénat. Il vise notamment à renforcer le pouvoir d’achat, accroître la transparence des acteurs économiques et améliorer la concurrence.

"C'est un texte qui contient des avancées significatives, mais nous pouvons aller plus loin", estime Naïma Moutchou, qui veut "écouter les parlementaires ultramarins" pour l'améliorer.

La ministre devra aussi défendre le budget 2026 des outre-mer, dont les coupes prévues inquiètent élus et acteurs économiques.

Deux dispositions les ulcèrent: le rabotage de dispositifs fiscaux destinés à encourager l'investissement outre-mer - 300 millions d'euros de réduction - et la réforme du dispositif "Lodeom" d'exonération de charges pour les entreprises ultramarines - 343 millions d'euros d'économie.

"Dans le contexte budgétaire actuel, chacun doit contribuer à l'effort national. Celui demandé aux outre-mer doit être juste", prévient la ministre, qui dit y travailler avec la ministre du Budget Amélie de Montchalin.

Autre dossier prioritaire: Mayotte, frappée en décembre 2024 par le cyclone Chido. Près de quatre milliards d'euros d'investissements sur six ans ont été votés en juillet avec la loi pour la refondation du 101e département français, rappelle-t-elle.

Une somme qu'elle s'engage à "sanctuariser", tout en plaidant pour la création d'une ligne budgétaire spécifique au petit archipel de l'océan Indien dès le projet de loi de finances 2026.

"Je me rendrai à Mayotte avant la fin de l'année", ajoute la ministre, qui revendique sa légitimité: "Je siégeais à la commission des Lois depuis huit ans. Je représentais mon groupe sur les dossiers ultramarins, et en particulier calédonien".

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