Tout d’abord, rappelons la règle. L’expression “après que” doit être suivie de l’indicatif, qu’elle soit au passé, au présent ou au futur : après qu’il eut, qu’il a, qu’il aura, etc. L’indicatif, c’est un “mode” de conjugaison, au même titre que le subjonctif, l’impératif, le conditionnel... Ils ont chacun leur fonction. L’impératif sert par exemple à donner des ordres et des conseils, le conditionnel suggère le souhait, l’hypothèse et la condition (c’est même dans le nom), le subjonctif est le mode du doute, l’indicatif celui de l’affirmation.
Et c’est cela qui explique que “après que” soit suivi de l’indicatif, car si on évoque l’après, c’est que l’avant est arrivé : après qu’il a mangé son burger, il a eu mal au ventre. En bref : ce qu’il y a après “après que” est arrivé... avant.
Au contraire, ce qui vient après “avant que” n’est théoriquement pas encore arrivé. Comme le rappelle Bruno Dewaele, champion du monde d’orthographe, professeur agrégé de lettres modernes, au site Projet-Voltaire, “le subjonctif, mode de ce qui n’est pas réalisé, mais seulement envisagé”. Avant qu’il ait mal au ventre, il a mangé son burger.
Mais ça “sonne” bizarre
Comment expliquer que la forme “après qu’il a” jure si souvent à l’oreille de celui ou celle qui l’entend ? Il y a la proximité avec l’expression “avant que”, bien sûr, mais il y a aussi ce réflexe naturel, par habitude, de mettre au subjonctif un verbe placé après “que”. Notons aussi que dans ses formes les plus littéraires, “après que” était suivi habituellement d’un passé simple, “après qu’il mangea”, ou carrément d’un passé antérieur, “après qu’il eut mangé”.
Or aujourd’hui, ces temps sont très peu utilisés, l’imparfait et le passé composé ayant largement remplacé le passé simple dans notre quotidien. On raconte rarement à nos amis que ce jour-là, nous “mangeâmes” des pommes, mais plutôt que nous en “mangions” ou en “avons mangé”. Selon moi (l’auteur de ces lignes), on a envie de conserver cet aspect “complexe”, par opposition à la simplicité directe (trop directe ?) de l’indicatif. La langue étant un marqueur social, il y a une crainte du jugement et donc, peut-être, une volonté de se protéger en choisissant la formulation la plus... élaborée.
Cette “erreur” est si répandue qu’elle aurait bien pu devenir la règle. La résistance des journaux, via notamment leurs secrétaires de rédaction, mais aussi de l’Académie française elle-même en 2011, ainsi que les assauts des puristes ont sauvé, au moins pour le moment, cette obligation de l’indicatif après l’expression “après que”.
Alors, selon vous, pourquoi est-ce qu’on fait cette “erreur” ? Et va-t-elle devenir la règle ? Dites-nous ce que vous en pensez.