Élections aux Pays-Bas : duel très serré entre l'extrême droite et le centre

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Le leader d’extrême droite, Geert Wilders, devance de peu Rob Jetten, chef du parti centriste D66, mais les dépouillements restants devraient avantager le progressiste.
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Jamais l'issue d'élections législatives aux Pays-Bas n'avait été aussi incertaine au lendemain d'un scrutin, avec seulement quelques milliers de voix d’écart entre les deux favoris et une poignée de décomptes encore à venir.

Le leader d’extrême droite, Geert Wilders, devance de peu Rob Jetten, chef du parti centriste D66, mais les dépouillements restants devraient avantager le progressiste.

Geert Wilders, parfois appelé le "Trump néerlandais", a lui-même déclenché les élections anticipées en torpillant le gouvernement sortant après un différend sur l'immigration.

Quoi qu'il arrive, il est peu probable qu'il devienne Premier ministre car tous les autres partis ont refusé, jusqu'à présent, de collaborer avec lui.

Alors, que va-t-il se passer dans le paysage politique néerlandais, chahuté par des mois de chaos orchestré par l'extrême droite ?

Quand aura-t-on un résultat définitif?

A priori, pas avant lundi ou mardi. Il reste encore 20% des votes d'Amsterdam à dépouiller, ce qui sera probablement fait vendredi soir.

Ensuite, il faudra compter les votes par correspondance des électeurs néerlandais résidant à l'étranger, ce qui pourrait prendre jusqu’à mardi.

Quelques autres circonscriptions favorables à Geert Wilders doivent encore annoncer leurs résultats d'ici là, mais cela ne lui donnera probablement pas une avance décisive sur Rob Jetten.

Ce dernier est donc en pole position pour devenir le plus jeune Premier ministre néerlandais, et le premier ouvertement homosexuel.

Comment se déroulent les négociations?

Le chiffre magique est 76. C'est le nombre de sièges nécessaires à une coalition pour avoir une majorité au Parlement, qui en compte 150. Dès la proclamation des résultats définitifs, les calculs seront faits pour déterminer quelle combinaison des nombreux partis en lice permettra d'atteindre ce nombre.

Selon une estimation de l'agence de presse ANP, le D66 et le PVV obtiendraient chacun 26 sièges.

Le dirigeant qui remportera l'élection a la priorité pour former une coalition, "un processus complexe et passionnant", comme le décrit le site web du Parlement.

Dans un premier temps, les partis politiques désignent un "éclaireur" qui se renseigne pour déterminer quels partis sont disposés à s'allier.

Ensuite, le Parlement nomme un "informateur" chargé d'évaluer les contours possibles d'un accord de coalition. Jusqu'à 2012, cette personne était nommée par le roi.

Lorsqu'un groupe se dessine pour travailler ensemble, un "formateur", presque toujours le leader du parti arrivé en tête, entre en scène pour constituer un gouvernement.

Un accord de coalition est ensuite signé et le nouveau gouvernement présente son programme au Parlement, suivi d'un vote de confiance.

Combien de temps cela prend-il?

Une éternité. Les partis rivalisent pour faire figurer un maximum de points de leur programme dans l'accord de coalition, et ce, avant même la course aux postes ministériels.

Le dernier gouvernement du Premier ministre démissionnaire Dick Schoof a mis 223 jours à se former.

Tous les partis ont cependant déclaré vouloir que le processus soit bouclé au plus vite cette fois.

"On imagine aisément que parvenir à un compromis entre quatre partis aux idéologies différentes sera extrêmement difficile", observe Sarah de Lange, professeure de sciences politiques à l'université de Leyde.

"Il est donc fort probable que la formation d'une coalition prenne beaucoup de temps, entre six mois et un an, par exemple", ajoute-t-elle, interrogée par l'AFP.

Quelles sont les possibilités?

Avec la quasi-totalité des votes dépouillés, une coalition quadripartite composée du D66 (26 sièges), du VVD libéral (22), de l'alliance de gauche Verts/Travaillistes (20) et du CDA de centre droit (18) pourrait former un gouvernement.

D'autres partis plus petits pourraient jouer un rôle crucial, comme le JA21 d'extrême droite (9).

Qui sera aux commandes ensuite?

Jusqu'à l'investiture officielle d'un nouveau gouvernement, le gouvernement démissionnaire de Dick Schoof gère les affaires courantes.

Généralement, la transition se déroule sans encombre. Le pays en a l'habitude, car jamais dans l'histoire des Pays-Bas un parti n'a obtenu plus de 50% des voix.

"Le gouvernement démissionnaire dispose de pouvoirs assez étendus pour gouverner les Pays-Bas, notamment celui de voter un budget et de modifier la législation", explique Mme De Lange.

"Les Pays-Bas ne sont donc pas totalement paralysés jusqu'à la formation d'une nouvelle coalition après ces élections", note-t-elle.

Les coalitions sont-elles stables?

Le problème dans un système si fragmenté, c'est qu'une coalition est toujours à la merci du retrait du soutien d'un parti, même petit.

De plus, les coalitions doivent intégrer un large éventail de points de vue, provenant de partis souvent politiquement assez éloignés et qui se sont attaqués mutuellement pendant la campagne.

Les élections aux Pays-Bas étaient suivies de près en Europe car elles devaient permettre d'évaluer l'ampleur de la poussée de l'extrême droite partout dans le continent, notamment au Royaume-Uni, en France et en Allemagne.

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