La Tunisie interdit les CDD et contrats de sous-traitance pour lutter contre la précarité

Crédit : Pixabay
Le Parlement tunisien a approuvé mercredi l'interdiction des contrats de sous-traitance et des contrats à durée déterminée, un projet-phare du président Kais Saied qui entend lutter ainsi contre la précarité mais suscite des inquiétudes pour l'économie.
À voir également sur Brut

Cet amendement au Code du travail a été adopté par 121 des 151 élus que compte l'Assemblée des représentants du peuple (ARP). Quatre se sont abstenus, aucun n'a voté contre. 

Le président du Parlement Brahim Bouderbala a assuré que la  réforme garantissait "la dignité humaine et le droit de tout citoyen à travailler dans des conditions décentes".

Les CDD sont très utilisés dans le secteur des services, à l'origine de la moitié des emplois en Tunisie, tandis que l'industrie manufacturière, qui compte de nombreux fournisseurs de groupes étrangers dans l'automobile, l'aéronautique et le textile-habillement, emploie environ 20% de la population active.

La nouvelle législation impose la conversion des CDD existants en contrats à durée indéterminée, avec une période d'essai de six mois pouvant être prolongée une seule fois. 

La Tunisie déjoue une tentative de contrebande de flamants roses

Des sanctions financières et même pénales en cas d'infraction

Elle prévoit des sanctions financières pouvant aller jusqu'à 10.000 dinars (environ 3.000 euros) d'amende, et même pénales (jusqu'à six mois de prison) en cas d'infraction.  

Elle inclut toutefois des exceptions avec des CDD pour les travailleurs saisonniers - sans précisions sur les secteurs concernés - ou des remplacements.

A compter de l'entrée en vigueur - prochaine - de la loi, tous les travailleurs travaillant comme sous-traitants ou fournisseurs de services, notamment dans le gardiennage, jardinage ou ménage, devront être employés en CDI de sociétés dispensant leurs services.

Si les défenseurs du projet se félicitent d'une avancée pour les droits des travailleurs, l'économiste Aram Belhadj juge que cela "ne réduira pas le chômage et ne soutiendra ni la croissance ni l'activité économique".

Le texte risque d'"encourager les employeurs à faire usage des périodes d'essai" puis à licencier les personnes concernées au terme de l'année de contrat, accroissant la précarité, dit-il à l'AFP. 

Malgré un rebond après le Covid, l'économie tunisienne reste en crise avec un chômage d'environ 16% (près de 40% chez les jeunes) et une forte inflation. 

La croissance a plafonné à 1,4% l'an passé (après 0,4% en 2023) grâce à l'exportation d'huile d'olive et au tourisme. Et la Banque mondiale a récemment revu à la baisse à 1,9% (au lieu de 2,2%) sa prévision pour 2025.

Pendant ce temps-là en Tunisie, des migrants sont expulsés dans le désert

A voir aussi