"Je n'ai trouvé aucune preuve crédible qu'il existait un danger de rébellion dans l'Etat d'Illinois", a déclaré la juge April Perry, citée par les médias américains, en lisant à l'audience les motivations de sa décision, après avoir longuement entendu les deux parties.
La juge, qui avait été saisie par le gouverneur démocrate de l'Illinois, JB Pritzker, et la mairie de Chicago, principale ville de l'Etat, a qualifié les allégations des responsables du ministère de la Sécurité intérieure de "non fiables".
Elle a également estimé que les militaires de la Garde nationale étaient peu formés au maintien de l'ordre et que leur déploiement à Chicago "ne ferait que jeter de l'huile sur le feu que la défense (le gouvernement, NDLR) a elle-même allumé", selon les mêmes sources.
"Donald Trump n'est pas un roi et son administration n'est pas au-dessus de la loi", a réagi le gouverneur sur X. "La Garde nationale n'a rien à faire dans les rues d'une ville américaine comme Chicago", a-t-il ajouté.
Un incident entre la police de l'immigration et un groupe de manifestants
Auparavant, une autre juge fédérale avait limité jeudi pour deux semaines les conditions d'usage de la force par les agents dépendant du ministère de la Sécurité intérieure, notamment le recours au matériel anti-émeute, lors des manifestations dans la région de Chicago.
Cette décision cite expressément "les membres de la presse, les manifestants ou les fidèles religieux qui ne représentent pas une menace immédiate pour la sécurité des agents de maintien de l'ordre ou pour autrui".
Elle fait apparemment référence à un incident largement relayé dans une vidéo sur laquelle on voit des agents fédéraux postés sur le toit d'un centre de la police de l'immigration (ICE) en banlieue de Chicago tirer avec un projectile sur un pasteur parmi un petit groupe de manifestants au pied du bâtiment.
Cet incident s'est produit il y a près d'un mois et les manifestants tentaient d'empêcher un véhicule d'ICE de sortir, s'est justifié le ministère de la Sécurité intérieure.
"Occupation"
C'est à la suite de manifestations devant des bâtiments de la police de l'immigration que Donald Trump a signé la semaine dernière un décret présidentiel pour l'envoi de centaines de gardes nationaux à Chicago afin de "protéger les agents et biens fédéraux".
Devant l'un de ces bâtiments en banlieue de Chicago jeudi, une quinzaine de manifestants interpellaient bruyamment les agents de l'ICE et les quelques gardes nationaux présents. Ils les traitaient notamment de "nazis" et de "lâches", ont constaté des journalistes de l'AFP.
"Aucun humain n'est illégal", pouvait-on lire sur une pancarte.
Environ 200 gardes nationaux du Texas (sud) et 300 membres de ce corps de réservistes de l'Illinois ont commencé leurs opérations dans la zone, a annoncé l'armée américaine mercredi soir.
Des locaux de ICE "ont été la cible de violences réelles et de menaces de violence", nécessitant "l'aide" du ministère de la Défense, a fait valoir l'administration Trump devant la justice, assurant que l'exécutif fédéral devait avoir le dernier mot.
L'Etat et la ville s'insurgent de leur côté contre une tentative de "créer une occupation militaire de l'Illinois par l'Etat fédéral" et affirment que cette démonstration de force ne fait qu'attiser les tensions.
Depuis des semaines, le président républicain ciblait Chicago, annonçant vouloir y déployer la Garde nationale comme il l'a fait à Los Angeles, Washington, et Memphis (sud), à chaque fois contre l'avis des autorités locales démocrates.
Un déploiement similaire à Portland (ouest), autre ville dirigée par les démocrates, a été provisoirement bloqué ce week-end par la justice. Mais une cour d'appel fédérale jeudi a paru encline à lever cette interdiction.
Donald Trump a érigé la lutte contre l'immigration clandestine en priorité absolue, évoquant une "invasion" des Etats-Unis par des "criminels venus de l'étranger" et communiquant abondamment sur les expulsions d'immigrés.