"J'ai profité des séances pour assouvir mes envies", a répondu l'homme de 63 ans interrogé par la cour criminelle du Val-d'Oise, avouant qu'"un certain nombre de ces massages n'avaient pas un but médical".
Combien de femmes ont été victimes de ces douloureuses palpations du bas ventre, durant lesquelles il se collait au bassin nu de ses patientes? "Une vingtaine, une trentaine peut-être", répond vaguement l'accusé aux juges.
Cinq victimes se sont portées partie civile dans le cadre de ce procès qui s'est ouvert lundi à Pontoise.
Avant l'audience, il pensait "avoir pris la mesure des souffrances provoquées" chez elles. Mais "après avoir entendu tous ces témoignages", il dit s'être "rendu compte qu'(il était) bien en-dessous de la réalité".
"Séance de torture"
N'usant que de périphrases pour évoquer "les actes inadmissibles" qui lui sont reprochés, l'ancien médecin a maladroitement promis aux victimes qu'il ne "ferait plus jamais ce genre de bêtises".
Sans détour, le président de la cour a, lui, rappelé la souffrance témoignée par les victimes quant à "ces séances qui ressemblent plus à des séances de torture".
Lundi, Leïla (prénom d'emprunt choisi par la victime) a témoigné publiquement des douleurs subies quand, outre ses doigts non gantés, l'accusé "introduisait aussi les aiguilles d'acupuncture dans (son) vagin, dans (son) anus."
Après une vingtaine de séances à endurer ces gestes au cabinet médical, la jeune femme de 20 ans dépose finalement plainte.
Ce jour de mai 2020, alors qu'elle est totalement nue, à quatre pattes, Leïla voit l'accusé s'écarter de la table de consultation pour lui photographier les parties génitales.
Le lien est alors fait par les enquêteurs avec une précédente plainte, déposée dix ans plus tôt contre le médecin.
Une jeune patiente avait dénoncé avoir surpris le généraliste en train de photographier ses parties génitales. Face à ses contestations, l'accusé aurait alors jeté la carte mémoire de son appareil photo aux toilettes en tirant la chasse d'eau. En 2010, cette plainte avait été classée sans suite.
Interrogé mardi, Alexandre I. a finalement reconnu ces faits qu'il avait totalement niés à l'époque.
Sortir du déni
Saluant "la maturité" des plaignantes, l'accusé a indiqué combien il trouvait "les victimes exemplaires" par leur comportement à l'audience, les remerciant même pour "la leçon de vie" qu'elles lui offraient.
Attentives à chaque mot de leur ancien médecin traitant, les parties civiles ont peu goûté ces compliments. Assises côte à côte au premier rang, les jeunes femmes se soutiennent mutuellement, se consolant à mesure que la cour questionne l'accusé sur leur sort.
Ses deux tresses rassemblées en un sobre chignon, Sarah, âgée aujourd'hui de 32 ans, est accompagnée de sa mère. Celle-ci s'éclipsera de la salle d'audience lors du poignant témoignage de sa fille.
Ce n'est que l'appel des enquêteurs en 2020 qui l'a douloureusement sortie du déni dans lequel elle s'était réfugiée à la suite d'une consultation cauchemardesque chez le généraliste.
Toujours traumatisée, Sarah s'était "convaincue que ça n'était pas arrivé". "Ca", c'est-à-dire une longue et forte pression des doigts non gantés du praticien sur son clitoris, suivi du bruit du déclencheur d'un appareil photo.
À la cour, Sarah dit qu'elle s'en veut de n'avoir pas porté plainte au moment des faits, en 2017.
Ce qu'elle attend du procès : que "n'importe quel médecin en France sache qu'il ne peut pas faire ça, on n'est pas un jouet sur lequel il a le droit d'user de son pouvoir".