Dans cette affaire, "le mobile peut paraître futile, mais il tient en fait à la personnalité même du Dr Péchier: ses failles personnelles qu'il a essayé de combler, ses fragilités, sa relation de couple et son parcours", a asséné le commandant de police Laurent Dumont.
"La seule façon qu'il a trouvé pour surnager c'est de commettre des empoisonnements", a encore dit le policier, persuadé de la culpabilité du médecin bien que celui-ci ait toujours clamé son innocence.
Parmi ces "failles personnelles", M. Dumont a cité le "sentiment de rejet de son père" éprouvé par un accusé qui "se voit comme le vilain petit canard", alors qu'il a "besoin de reconnaissance et d'être considéré comme le meilleur".
Frédéric Péchier a le sentiment qu'il n'obtiendra "jamais" la reconnaissance de ses pairs car il court en vain "après celle de son père", lui aussi anesthésiste, a-t-il analysé.
"Sentiment d'infériorité"
"C'est un marqueur très fort, chez le tueur en série, le sentiment de rejet", a ajouté Laurent Dumont, qui travaille à l'Office central pour la répression des violences aux personnes (OCRVP) de Nanterre, notamment spécialisé dans les faits sériels.
Une autre "faille", selon l'enquêteur, réside dans la relation "totalement déséquilibrée" que Frédéric Péchier entretenait avec Nathalie, son épouse dont il est aujourd'hui séparé.
Nathalie est cardiologue, une spécialité considérée comme le "top du top" dans les professions médicales: l'accusé a donc eu "un sentiment d'infériorité par rapport à sa femme", et celle-ci, parce qu'elle lui reprochait de passer trop de temps à la clinique et pas assez à la maison, l'a "empêché de travailler autant qu'il le (voulait) pour se sentir le meilleur", selon Laurent Dumont.
"Convaincre sa famille"
Jeudi, au dernier jour d'une longue séquence de deux mois d'audience consacrée à l'examen des faits qui lui sont reprochés, Frédéric Péchier a une nouvelle fois clamé son innocence. "Je maintiendrai toujours que je ne suis pas l'empoisonneur", a-t-il martelé, inébranlable.
"La seule chose qui compte pour lui", a analysé l'enquêteur de personnalité, c'est de "convaincre sa famille", appelée à la barre à partir de lundi.
"Il préfère les entraîner avec lui que d'avouer. L'espoir de la vérité viendra peut-être de la famille Péchier, qui sont des gens bien. Ils l'aiment, ils lui pardonneront", a commenté le policier.
Le témoin a par ailleurs évoqué deux précédents dossiers qui ont, selon lui, forcément influencé l'accusé: la mort d'une patiente en 1984 dans un hôpital de Poitiers, pour laquelle trois médecins rivaux seront finalement acquittés, et 14 cas d'euthanasie recensés par la justice entre 1998 et 2001 au CHU de Besançon.
À Poitiers, le père de l'accusé était anesthésiste dans le service concerné, sans être impliqué. Frédéric Péchier était adolescent, "ce n'est pas possible qu'il n'ait pas été influencé", a estimé Laurent Dumont. Et dans l'affaire des euthanasies de Besançon, il n'a joué aucun rôle mais était interne dans le service, a observé le policier, pour qui "l'affaire Péchier, c'est une réplique de ces deux affaires".
L'accusé, qui comparaît libre, encourt une peine de réclusion criminelle à perpétuité. Le verdict est attendu d'ici au 19 décembre.








