Un ancien nazi à la tête d’une secte au Chili : l’histoire de la Colonia Dignidad (épisode 1/4)
Épisode 2/4 : Le premier rescapé
Wolfgang Kneese a 16 ans, il fait partie des premiers arrivés, sa mère est restée en Allemagne. Depuis qu’il est ici, il n’a plus le droit de la contacter. Il se rend compte que la vie au sein de la colonie n’a rien de normale. En pleine nuit, il décide de s’échapper de la Colonia Dignidad.
Mais il est rapidement rattrapé par des membres de la colonie, qui le ramènent à la maison, devant tous les membres de la communauté.
“Je n'oublierai jamais les yeux de ces hommes et de ces femmes”, témoigne-t-il auprès d'Arte en 2020.
En voulant s’enfuir, Wolfgang Kneese a trahi la communauté et Dieu, selon Paul Schäfer. Il est alors privé de parole pendant un an, surveillé jour et nuit par deux autres habitants et régulièrement tabassé, pendant trois années consécutives.
Deuxième fugue
Un jour, il surprend les deux hommes qui le surveillent à évoquer sa mise à mort. Cette conversation stimule chez Wolfgang Kneese son instinct de survie. Il décide de tenter à nouveau de fuguer.
Il saisit un moment d’inattention de ses surveillants pour partir.
Il traverse des kilomètres dans la forêt en courant, puis réussit à gagner un village, où il raconte son histoire et demande aux Chiliens de l’aide.
C’est lui qui va révéler pour la première fois à la presse internationale ce qu’il se passe dans la Colonia Dignidad, accusant Paul Schäfer de l’avoir violé et dénonçant les travaux forcés imposés à l’ensemble des habitants de la communauté.
En retour, les membres de la colonie construisent une histoire de toute pièce : ils l’accusent d’avoir lui aussi abusé sexuellement d’autres enfants.
Leur plan marche à merveille, puisqu’un procès a lieu et que Wolfgang Kneese est condamné à 5 ans de prison, mais il échappe à sa peine en retournant en Allemagne avant qu’elle soit prononcée. À partir de là, il décide de consacrer le reste de sa vie à lutter contre la colonie.
L’emprise de Paul Schäfer sur les enfants
Dans la colonie, l’ambiance est de plus en plus invivable. Les enfants, élevés loin de leurs parents, grandissent dans un climat de peur et de rivalité.
La nuit, l’emprise devient totale : les enfants sont lavés par les “tantes”, ou par Paul Schäfer lui-même, avant d’être conduits dans sa chambre. Les abus sont constants, les garçons ne sont autorisés à avoir des relations sexuelles qu’avec lui, et n’ont bien évidemment pas le droit d’en parler, sous peine “d’aller en enfer”.
Paul Schäfer impose à chaque habitant de la colonie d’apprendre à jouer au moins un instrument de musique, c’est lui qui choisit d’attribuer un instrument à chaque habitant. Il exige que ses disciples jouent de la musique pour lui le soir.
Il interdit aussi toute possession matérielle. Les hommes et femmes ne peuvent pas avoir d’objet personnel. Les membres de la communauté n’ont aussi aucune notion du temps. Les montres et les calendriers sont totalement proscrits au sein de la colonie.
“Nous dormions à 5 ou 7 par chambre”, témoigne Anna Schnellenkamp, une ancienne habitante de la colonie. Selon le gourou : “rien ne doit vous distraire de vos croyances en Dieu”.
La situation politique au Chili devient instable. En 1973, l’armée renverse le gouvernement socialiste de Salvador Allende, et le général Augusto Pinochet prend le pouvoir. Dans ce nouveau climat de dictature et de terreur au Chili, la Colonia Dignidad va étendre davantage son influence…
L’épisode 3/4 disponible demain.
