Au centre d'appel du 3020 contre le harcèlement scolaire

"Ces appels sont éprouvants, parce que ces ados sont vraiment en souffrance." Ils essaient d'apporter des repères aux enfants. Pour Brut, Mina Soundiram a rencontré Audrey, écoutante pour le 3020, le numéro mis en place par l'Éducation nationale pour lutter contre le harcèlement scolaire.

Plus de 77 000 sollicitations en 2021


Non au harcèlement à l’école, bonjour”. Audrey est écoutante au centre d’appel relié au 3020, le numéro créé par l’Education nationale visant à lutter contre le harcèlement à l’école. Cette plateforme d’écoute gérée par l’association L’école des parents et des éducateurs d’Île-de-France reçoit de plus en plus d’appels. Harceleurs, harcelés, parents d’enfants… Tout au long de la journée, elle a différents profils avec qui elle échange par téléphone. Et les appels s’enchaînent. Chaque jour, une quinzaine d’appels téléphoniques sont reçus au centre. “Il y a eu 77 417 sollicitations en 2021 et on en a traité 18 295” explique François, écoutant, ajoutant “Donc il faudrait qu’on soit 3 - 4 fois plus nombreux pour les traiter”. 

Voir le documentaire Brut sur Dinah, harcelée à l’école, qui s’est suicidée


Là, je viens d’avoir un appel, c’était la maman d’un petit garçon de dix ans qui nous appelait parce qu’elle vient de découvrir que son fils en CM2 subissait du harcèlement” décrit Audrey, écoutante au 3020. “Cette maman ressent beaucoup de culpabilité par rapport à ce qu’il se passe. Le fait de découvrir la situation de harcèlement de son fils. Elle l’a découvert parce qu’il est revenu avec un bleu. Elle est complètement passée à côté… Elle n’a pas vu. Comme l’enseignante et le directeur, d’ailleurs, qui n’ont pas vu non plus”. La priorité pour Audrey est de “prendre le temps d’écouter et de travailler sur les ressentis. Faire comprendre aussi à ces parents qu’ils n’y sont pour rien”.

Quand les adolescents parlent du harcèlement scolaire


Inviter les enfants harcelés à en parler à leurs parents


“Dans les situations de harcèlement où on fait intervenir le référent académique, on fait sortir nos interlocuteurs de l’anonymat et on remplit ce qu’on appelle une transmission auprès du référent académique. C’est une fiche qui comporte plusieurs types d’informations : la qualification des faits, l’antériorité des situations de harcèlement, les coordonnées du parent, soit la mère, soit le père. On ne peut pas faire de transmission avec une grand-mère ou avec un frère ou une sœur” développe Audrey. Au téléphone, quelques minutes plus tard, elle enchaîne cette fois avec un enfant harcelé. Elle l’invite à en parler avec ses parents pour qu’ils puissent lui “venir en aide”. “C’est à eux ensuite de prendre le relais, de pouvoir discuter avec le principal du collège, de signaler la situation. Si tu ne dis rien, la situation ne va pas bouger”.

Quand le harcèlement scolaire conduit à l'hôpital


De manière de plus en plus fréquente, Audrey échange aussi avec des parents d’élèves agresseurs “qui se posent des questions”. “Et ça, c’est hyper important qu’on en parle aussi. Parce que c’est important que l’on puisse être contacté quel que soit le côté, que l’on soit agressé, que l’on soit victime, agresseur… Que l’on soit témoin, parce qu’il y a beaucoup aussi de témoins silencieux qui ne parlent pas. Donc c’est très important que vous puissiez nous contacter au 3020 et qu’on puisse justement répondre à vos questions”. La jeune femme met en garde aussi contre certains cas où la parole de l’enfant n’est pas prise au sérieux, où la situation est “minimisée”. “Il n’ y a rien de plus insupportable que ça, quand on a sa propre vérité, sa propre souffrance, d’entendre des adultes nous dire : “Oh, c’est des chamailleries, ça va passer.” C’est pour ça que le harcèlement scolaire, c’est aussi une affaire d’adultes et plus largement une affaire de toute la société, en réalité”. 

Actrice dans le film "Un Monde", Maya a été victime de harcèlement scolaire


Comment est puni le harcèlement scolaire ?

Depuis le 3 mars 2022, le harcèlement scolaire est reconnu par la loi française comme un délit pénal qui peut être puni jusqu’à 10 ans d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende. Chaque année, le harcèlement en France toucherait un enfant sur dix scolarisé. 

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