Sangliers : la reprise de la chasse relance le débat entre chasseurs, défenseurs des animaux et agriculteurs

Ils causent de nombreux dégâts. En France, 750 000 sont tués chaque année. Mais pour les associations de protection des animaux et les agriculteurs, si les sangliers prolifèrent, c'est surtout à cause des chasseurs eux-mêmes.

Sangliers : la reprise de la chasse relance le débat entre chasseurs, défenseurs des animaux et agriculteurs


Pour expliquer la prolifération du nombre de sangliers, les associations de protection des animaux et les agriculteurs pointent du doigt la part de responsabilité des chasseurs.


En 40 ans, le nombre de sangliers a explosé en France, causant de nombreux dégâts sur les cultures. Dans les années 1970, 30.000 sangliers étaient prélevés à la chasse chaque année. Aujourd'hui, ils sont 750.000. La reprise de la chasse au sanglier cet été relance un débat tendu entre les chasseurs et les défenseurs des animaux, mais aussi avec les agriculteurs. En 2019, les dégâts causés par les sangliers sur l'ensemble des terres agricoles françaises se sont élevés à 80 millions d'euros.


« L'agrainage fait exploser les populations de sangliers »


« C'est une situation qui est insupportable aujourd'hui, elle détruit non seulement économiquement le travail des agriculteurs, mais elle détruit aussi psychologiquement le moral de nos agriculteurs et de nos agricultrices », alerte Thierry Chalmin, président de la commission « faune sauvage » de la FNSEA. Pour expliquer la prolifération du nombre de sangliers, les associations de protection des animaux et les agriculteurs pointent du doigt la part de responsabilité des chasseurs.


Marc Giraud, porte-parole de l’Association pour la protection des animaux sauvages, résume cette évolution : « La première cause de prolifération des sangliers, ce sont les chasseurs. Ça pour trois raisons. D'abord, au cours des siècles, ils ont fait disparaître leurs prédateurs. Ensuite, ils les ont élevés pendant des années, à partir des années 70. Enfin, aujourd'hui encore, ils les agrainent. Ils disposent des grains pour attirer les sangliers et les nourrir. L'agrainage, ça fait exploser les populations de sangliers, il faudrait arrêter totalement l'agrainage en France. »


Pour Thierry Chalmin, même s’il les estime indispensables à la régulation des espèces, il est urgent que les chasseurs prennent conscience qu’en ce qui concerne les sangliers, « le point de non-retour est quasiment atteint ». Actuellement, il y aurait en France plus d'un million de sangliers. Mais les chasseurs refusent d’être considérés comme les seuls responsables du nombre croissant d'individus.


Les chasseurs refusent d’être considérés comme les seuls responsables


« Il y a eu le développement de cultures et la généralisation de cultures qui sont particulièrement propices aux sangliers, où ils trouvent tout ce qu'il faut pour se nourrir. Enfin, le sanglier est une espèce qui s'est remarquablement adaptée au réchauffement climatique avec des hivers peu rigoureux, une nourriture abondante, une mortalité des jeunes très basse. Aujourd'hui, on se retrouve avec souvent trois portées en deux ans », argumente Nicolas Rivet, directeur général de la Fédération nationale des chasseurs.


Depuis 1968, les agriculteurs peuvent réclamer une indemnisation pour les dégâts sur leurs cultures aux fédérations de chasse. Une aberration pour Nicolas Rivet. « Le système est à bout de souffle. On a des fédérations départementales obligées d'emprunter pour pouvoir régler cette facture des dégâts. Nous ne chassons pas sur 100 % du territoire, mais nous payons 100 % des dégâts. Puisqu’aujourd'hui à peu près 30 % du territoire n'est pas chassé, zones péri-urbaines ou territoires soustraits à la chasse. »


« La solution la plus naturelle, c'est de laisser les prédateurs revenir »


Si les chasseurs s'estiment indispensables dans le contrôle des populations de sangliers, les associations de protection des animaux remettent en question le rôle de régulateur attribué aux chasseurs. « On voit bien que pour le sanglier, comme pour plein d'autres animaux, la chasse est une gestion catastrophique. Les sangliers prolifèrent alors que ce sont les chasseurs qui ont eu la mainmise sur leur gestion », constate Marc Giraud.


Comment contrer les proliférations de sangliers et les dégâts aux cultures ? Pour lui, il existe trois solutions. Mais toutes ne se valent pas. « Il y a d’abord l'effarouchement avec des détonateurs ou des fils électriques, mais ça, c'est plus de travail encore pour les agriculteurs. Ensuite, à moyen terme – et c’est plus éthique que de flinguer du cochon à tour de bras – on peut stériliser les animaux. Mais ça, c'est long et coûteux, et il faut trouver les financements. La solution la plus naturelle et la plus satisfaisante pour un naturaliste, c'est de laisser les prédateurs revenir, comme le loup, et de recréer un équilibre naturel. »


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