Entretien exclusif avec Dimitri Payet

Les jets de bouteille, la ferveur marseillaise, sa famille... Pour Brut, Rémy Buisine s'est entretenu avec le capitaine de l'OM, Dimitri Payet.

Cette saison ne s’est pas forcément toujours passée comme prévu. Comment as- tu vécu ces incidents à Nice puis Lyon ?


Dimitri Payet, capitaine de l’OM : “Difficilement. Parce qu’au-delà de la douleur physique, c’est surtout le ressenti d’être le coupable alors qu’on est victime de ce qu’il s’est passé.


La deuxième fois était plus difficile à digérer parce que j’ai compris qu’il n’y aurait pas de solidarité entre nous joueurs, entre clubs, entre dirigeants. Et c’est là où je me suis dit que c’était peut-être plus grave que ce que je pensais.


Sur les deux incidents, les seules excuses que j’ai eues et où j’ai senti que c’était sincère, c’était Christophe Galtier. Il y a eu des excuses de la part des dirigeants niçois mais c’était en commission et je pense que c’était plus pour se défendre devant la commission. Je n’ai pas senti de sincérité dans ces excuses-là.


À Lyon, il y a eu des tweets de faits mais pareil, je pense que c’était plus pour se défendre. Il n’y a pas eu de nouvelles de demandées que ce soit des joueurs, de l’arbitre, des délégués. Donc c’est là où j’ai compris qu’il y avait beaucoup de travail à faire pour un truc "normal".”


Incidents Lyon-OM, après ceux de Nice-OM, l’histoire se répète. Voici ce qu’il s’est passé lors des incidents qui ont perturbé le match de football Lyon-OM.


Comment as-tu vécu ces deux heures à Lyon ?


“Mentalement c’est difficile, on se dit que c’est la deuxième fois. On pense aussi à nos proches qui doivent s’inquiéter, parce qu’à Nice il y a quand même eu un envahissement de terrain aussi, chose qui n’est pas banale.


Au-delà de la rancœur, moi, ce que j’ai voulu, c’est commencer à trouver des solutions pour que cela n’arrive plus. Et je l’ai dit : que ce soit sur Payet, sur Neymar ou Mbappé ou Aouar, là, il n’y a plus de clubs, il n’y a plus de rivalités, c’est vraiment protéger les joueurs.


Les deux fois, mes enfants étaient devant la télé. Ils ont vu ça en direct, donc forcément c’était un peu la panique pour eux. Après j’ai essayé rapidement de leur donner des nouvelles dans le vestiaire pour leur dire qu’il n’y avait rien de grave.


Mais ce ne sont pas de belles images à voir pour des enfants, que ce soit les miens ou d’autres d’ailleurs ! C’est aussi sensibiliser ces enfants-là qui seront des supporters demain et qui, je l’espère, ne feront pas les mêmes erreurs que d'autres.”


En direct du Stade Vélodrome, le joueur de football Didier Drogba est revenu sur les 5 moments qui ont changé sa vie.


Il y a eu cette tribune du Monde où tu avais des mots forts : "Est-ce que je dois arrêter de jouer au football ?” Arrêter, est-ce que tu y as pensé à un moment ou un autre ?”


“Pas d’arrêter de jouer au football, parce que je ne suis pas quelqu’un qui baisse les bras. Et on ne m’empêchera pas de faire ce que j’aime, de faire ma passion mais c’était surtout pour dire : "Est-ce que, nous, nous sommes fautifs aujourd’hui, les joueurs ?"


Il est vrai que ça a fait beaucoup parler, mais qui a donné le début d’une solution ? Qui a dit : “il faut faire ça vraiment pour que ça s’arrête ?” Personne.


Il y a aussi l’adaptation vis-à-vis de ton propre comportement, tu disais que tu es une personne qui aime bien charrier, célébrer les buts d’une certaine façon et quelque part, tu as dû modifier cela ?


“Oui, parce que je me suis posé des questions. Pourquoi autant de haine, pourquoi on en est arrivé là ? Et je me suis dit que c’est vrai que je suis assez chambreur parfois en conférence de presse ou avant les matchs, mais c’est vraiment du second degré.


Mais, je me suis dit que peut-être que le camp d’en face ou les supporters d’en face le prennent au premier degré, ce qui amène peut-être une haine et une violence envers moi ou envers mon équipe dans les stades, donc j’ai dit que je commencerais par enlever ça, ce sera déjà ça de fait. Pour éviter tout incident, j’ai préféré dire que j’arrêtais tout ça.”


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Tu as un lien très fort avec la ville de Marseille et avec ce club. Pourquoi Marseille plus que Nantes, Saint-Étienne ou Lille ?


“Je pense que j’ai fait, on va dire, quasiment tous les plus grands clubs en France avec Nantes, Lille, Saint-Étienne. Mais quand on a connu ici, c’est compliqué d’aller ailleurs.


Je l’ai fait, mais il y a quelque chose ici qui m’attire, c’est d’être sans cesse sous pression, sans cesse attendu, et on ne peut pas se reposer sur ce qu’on a déjà fait ou sur le match d’avant.


On peut faire six mois au top niveau, rater deux matchs et on vous tombe dessus, donc ça pousse à travailler, à travailler dur. Et surtout, c’est aussi le fait de jouer dans ce stade-là. Et moi j’ai toujours dit que je jouais au foot pour être dans ce genre de stade.


Je dis souvent aux nouveaux arrivent, que c’est que, quand ça va bien, c’est facile de jouer ici, parce que tout va bien. Mais, par contre, quand on joue là-dedans et que ça siffle, ce n’est pas la même sauce et il ne faut pas se cacher, donc Marseille peut vous sublimer comme Marseille peut vous éteindre.


Et on l’a vu avec de très grands joueurs qui sont passés ici mais qui n’ont pas réussi à supporter cette pression quotidienne.”


L’équilibre familial, ça a toujours été ta priorité ?


C’est primordial, parce que j’ai eu des enfants très tôt, et c’est sûr que, quand ils grandissent, ne pas arrêter de bouger c’est compliqué. Et je trouve que ce premier passage ici, on avait trouvé une stabilité qui était bonne pour les enfants, pour moi, pour ma femme.


Et à West Ham, sportivement, c’était top pour moi, mais c’était plus compliqué pour eux, donc forcément il y avait un décalage entre moi sur le terrain et moi à la maison et je savais que ça ne pouvait pas tenir éternellement.


Il y a un autre sujet aussi, c’est celui de l’équipe de France… C’est toujours dans un coin de ta tête ?


C’est comme la retraite, tant que pour moi j’aurais un niveau qui peut être international, j’y penserai. Après, quand on voit les listes de sélection, il faut la gagner, cette place ! Il y a du monde, il y a du beau monde, donc je ne dis pas que j’ai fait mon temps, mais j’ai eu mes belles années en sélection et s’il faut revenir, je reviendrai, il n’y a pas de souci mais, si ça ne revient pas, je n’ai pas de regrets.


Quand on parle des 23, on peut peut-être dire un mot sur l’OM justement, avec deux jeunes joueurs qui sont arrivés cette année avec Saliba et Guendouzi qui ont été appelés en équipe de France. Toi, tu leur transmets un peu ton vécu, ton expérience ?


Oui, mais j’essaie surtout de les calmer ! Parce que Matteo, il est un peu taré, donc il a tendance à être un peu fou-fou, donc j’essaie d’être, on va dire, la parole du sage. Mais c’est bien, parce que c’est un gagnant, c’est un mec qui veut aller de l’avant. Et Willo pareil, ce sont des jeunes qui sont "jeunes mais pas jeunes", parce qu'ils ont beaucoup d’exigence envers eux-mêmes, ils savent où ils veulent aller, et s’ils sont aujourd’hui avec les A, ce n’est pas un hasard.


Ensemble supporters de l’OM et de Lens rendent hommage à l’un des leurs. Au Stade Vélodrome, les supporters se sont joints pour rendre hommage à l’un des supporters de l’OM, Clément, 23 ans, décédé dans un accident de la route alors qu’il rentrait du match Angers-Marseille.


Comment tu te projettes, toi, justement sur cette fin de saison, il y a quand même beaucoup d’objectifs


C’est excitant ! Je préfère avoir à jouer cette deuxième place jusqu’au bout avec un calendrier qui est quand même assez chargé, un quart de finale de Coupe d’Europe. Je pense qu’on a, je l’espère, une belle fin de saison à vivre.


Qu’est-ce qu’on peut te souhaiter pour la suite ?


La santé ! Avec tout ce qu’on voit à la télé aujourd’hui, si on est en bonne santé, c’est déjà bien ! Mais après, d’être heureux. Je pense qu’à partir du moment où on est heureux dans sa vie, on sera heureux au travail et on sera heureux en général !


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