Le destin de Sahar, héroïne de Beyrouth

Le destin brisé de Sahar. Elle avait 27 ans. Elle était sur le point de se marier. Elle est morte le 4 août lors de l'explosion qui a ravagé Beyrouth.

Le destin de Sahar, secouriste libanaise tuée dans l’explosion de Beyrouth


Elle avait 27 ans, elle devait bientôt se marier. Elle comptait parmi les secouristes les plus efficaces et les plus courageux. Elle est morte le 4 août, pendant l’explosion du port de Beyrouth.


« Sahar, c'était une infirmière qui aimait sourire tout le temps. Elle était courageuse. C’était son destin », se souvient le Lieutenant Michel Murr, au bord des larmes. Le militaire travaillait à la caserne Quarantina de Beyrouth, avec Sahar Fares, une secouriste de 27 ans. Sarah est décédée le 4 août dernier, lors de la double explosion qui a touché le port de Beyrouth, au Liban.


« Sahar allait à la caserne de pompiers même quand elle était en congé »


« Sahar allait à la caserne de pompiers même quand elle était en congé. Elle aimait la caserne », se rappelle pour sa part son fiancé, Gilbert. « Les hauteurs qu'elle arrivait à atteindre et redescendre en rappel, moi-même je n'aurais jamais eu le courage de les faire. Il y a une photo de Sahar sur chaque téléphone portable là-bas. Tout le monde l’aime. »


Sahar Fares naît à Beyrouth en 1993 dans une famille chrétienne d’origine modeste. Elle est l'aînée de trois filles, et elle adore s'occuper de ses deux soeurs, Maria et Naram. À l'âge de 15 ans, elle intègre une école d'infirmières à Beyrouth. Trois ans plus tard, elle obtient son diplôme et elle commence à travailler dans les hôpitaux de la capitale.


Elle s'impose très vite grâce à son courage et sa force physique


Elle a 21 ans quand elle rencontre Gilbert. Ils tombent très vite amoureux et décident de se fiancer deux ans plus tard. À 23 ans, Sahar s'engage en tant que volontaire pour être sur le terrain, auprès des pompiers de Beyrouth. Dans un milieu majoritairement masculin, elle s'impose très vite grâce à son courage et sa force physique. Elle impressionne tout le monde dans sa caserne.


Sarah devait se marier avec Gilbert en 2020, mais la date avait été décalée au 6 juin 2021 à cause de l’épidémie de Covid-19. Le 4 août 2020, Sahar est à sa caserne. Il est 17h50 quand les pompiers reçoivent une alerte incendie. « À un moment donné, on a eu un appel pour la chambre d'opérations disant qu'il y avait de grandes fumées qui sortent des dépôts du port. Là, on a envoyé les premiers intervenants dans un fourgon d'incendie et une ambulance. Il y avait neuf pompiers et une infirmière », se souvient le Lieutenant Michel Murr.


« La ligne a coupé »


L'infirmière de garde, c'est Sahar. Gilbert raconte : « Ce jour-là, elle m'a appelé en vidéo dès sa sortie en mission. Quand elle est montée dans l’ambulance, elle n'a dit aucun mot. Elle a juste fait « au revoir » avec la main. Je lui ai demandé : « Qu'est-ce que tu as ? » Elle m'a fait ce geste de la main : « Je t'appellerai plus tard. » »


Quand elle arrive au port, elle envoie une vidéo à Gilbert. « Je l'ai rappelée en vidéo pour comprendre ce qu'il se passait. Elle avait peur… Très peur. Au point qu’elle ne savait pas quoi faire. J'entendais un bruit très étrange à côté d'elle. Je lui ai dit : "S'il se passe quelque chose, cours !" Elle s'est rendu compte de la situation. Qu'il fallait réagir. Elle s'est mise à courir. Je ne me rappelle pas exactement du nombre de secondes, mais je dirais de 8 à 12 secondes. Et la ligne a coupé. »


À la place de l'entrepôt, Gilbert découvre un cratère


Gilbert se rend alors au port pour essayer de retrouver sa fiancée. Mais quand il arrive sur place, c'est le chaos total, tous les bâtiments sont détruits. À la place de l'entrepôt, il découvre un cratère. Il cherche Sahar dans tous les hôpitaux de Beyrouth. « J’ai demandé un miracle à Dieu. 0,0001 %… C'était l'espoir auquel je tenais encore. Le lendemain, nous sommes allés à la caserne. Je leur ai dit : « Si elle est morte, dites-le-moi. » J'ai perdu mes nerfs… Je la voulais à tout prix. 30 minutes à une heure plus tard, on nous a appelés pour nous dire que Sahar avait été trouvée et on nous a présenté des condoléances. »


Sahar est morte sur le coup, en même temps que tous les membres de son équipe. La cause de cette énorme déflagration, c'est la présence sur place de plusieurs tonnes de nitrate d'ammonium, un produit chimique hautement explosif. L’équipe n’aurait rien pu faire. Au Liban, Sahar et ses collègues sont désormais considérés comme des héros. La jeune secouriste a été enterrée dans le village de sa famille, situé près de la frontière syrienne.


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