Harcèlement de rue : Morgane témoigne
Le témoignage de Morgane, harcelée dans la rue
Morgane s’est fait harceler dans la rue. Ce n'était pas la première fois, mais elle a tenu cette fois-ci à le dénoncer sur Twitter. Elle raconte pourquoi.
« On ne peut rien faire. On est là et parce qu’on est là, dans la rue, on subit des insultes, on subit des injures, on se fait suivre, on se fait siffler, on se fait klaxonner, on se fait toucher. Certaines se font agresser. Ce n’est pas normal. Aujourd’hui, le fait de simplement marcher dans la rue, ça ne devrait pas être un privilège. Pourtant, on en est arrivé là. » Morgane s’est fait harceler dans la rue. Ce n'était pas la première fois, mais elle a tenu cette fois-ci à le dénoncer sur Twitter. Pour Brut, elle raconte pourquoi.
« Je pense qu’il y en a qui n’ont pas vraiment l’habitude qu’on leur réponde »
Ce jour-là, Morgane est à la gare de Nancy. Elle est alors interpellée par un homme qui lui assène des propos à connotation sexuelle, dégradants. « Il y avait une bande de potes avec lui qui ont surréagi parce que ce jour-là, j’ai répondu. Et je me suis fait traiter de tous les noms par toute cette bande de garçons. »
Morgane se retourne alors, et regarde son harceleur. « Quand j’ai vu son regard, j’ai un peu pété un plomb. Je lui ai demandé s’il y avait un problème, qu’est-ce qu’il avait dit, s’il pouvait me le redire, et j’ai vu dans ses yeux qu’il ne s’y attendait pas. Je pense qu’il y en a qui n’ont pas vraiment l’habitude qu’on leur réponde. » L’homme recule, et la traite de salope. Puis d’autres insultes misogynes.
« À partir du moment où on revêt cette image de femme, on est soumise au risque du harcèlement de rue »
Dans ces circonstances, il est rare que la femme réponde, et pour cause : elle a peur pour son intégrité physique. « Je pense que ça s’est fait dans la durée, c’est quelque chose qui est resté ancré. Si on ne répond pas, ça normalise, mais de l’autre, c’est prendre le risque de l’agression. Derrière le harcèlement de rue, c’est surtout la peur de l’agression, de l’enlèvement ou même du viol », analyse Morgane.
Pour la jeune femme, ce phénomène touche absolument toutes les femmes. « Que ce soient les femmes jeunes, les femmes moins jeunes, les femmes blanches, les femmes racisées, les femmes voilées, les femmes transgenres. Je pense qu’à partir du moment où on revêt cette image de femme, on est soumise au risque du harcèlement de rue. » En août 2018, une loi a été adoptée pour sanctionner le harcèlement de rue. Un an après son adoption, en 2019, 713 contraventions pour « outrage sexiste » ont été dressées par les forces de l’ordre.
« Ils ont essayé de nous entraîner dans une petite ruelle, sombre, sans personne »
Pourtant, selon Morgane, le problème est loin d’être réellement pris au sérieux à l’heure actuelle. « C’est quelque chose qui arrive super fréquemment, le harcèlement de rue. Surtout depuis la fin du confinement. Je pense qu’on est toutes d’accord pour dire que c’est un phénomène qui a vraiment explosé. C’est à chaque coin de rue, à chaque fois qu’on sort. Là, ça faisait trois ou quatre fois que j’étais sortie, qu’on se faisait interpeller, on se faisait attraper, suivre, siffler… »
Il y a quelques semaines, Morgane a vécu une altercation particulièrement effrayante avec des hommes harceleurs. « J’allais juste manger, le soir, avec une amie. Toutes les deux, on marchait dans la rue et on s’est fait interpeller par un groupe de garçons auxquels on n’a pas répondu. On ne voulait pas se faire embêter. On a continué de marcher comme si de rien n’était. Sauf qu’ils nous ont rattrapées. Ils ont commencé à nous parler, puis à nous attraper au niveau de l’épaule. Ils ont essayé de nous entraîner dans une petite ruelle, sombre, sans personne », frissonne la jeune femme. Mais si Morgane s’en est sortie indemne ce soir-là, de nombreuses femmes n’ont pas eu, ou n’auront pas cette chance.
Maud Le Rest