Une vie : Rene Silva, celui qui casse les clichés sur les favelas
“Quand on n'a pas accès à l'école ni à la technologie et quand on peut se faire tirer dessus ou être touché par une balle perdue à tout moment, on nous vole nos rêves”. Rene Silva vit dans l'une des favelas les plus violentes du Brésil, mais il se bat contre les clichés qui collent à la peau des habitants de son quartier. Né le 25 octobre 1994 à Rio de Janeiro, il grandit au Complexo do Alemão. À 11 ans, Rene Silva crée un journal local pour sa communauté: Voz das Comunidades. Voix des favelas. Pour pouvoir payer l'impression du journal, il vend des confiseries préparées par sa famille dans la rue. “Souvent, la société, le gouvernement pensent que tous les gens qui vivent dans les favelas sont des criminels, ou qu'ils sont complices, ou qu'ils y sont liés d'une manière ou d'une autre. Alors, c'est notre grand défi d'essayer de montrer que ce n'est pas la réalité, que la plupart des gens qui vivent dans ces environnements travaillent dur, luttent jour après jour pour survivre et essaient d'avoir une vie meilleure et digne” explique Rene Silva.
Cannes 2023 : La réalité dramatique de l'IVG au Brésil
“Sur le chemin de l'école, j'ai commencé à voir chaque jour de nombreux problèmes sociaux, comme l'absence d'eau dans les maisons, le manque d'éclairage public dans de nombreuses parties de la communauté ou même de lumière dans les habitations. Et je me suis dit que nous devions faire quelque chose, que nous devions montrer ce qu'il se passe réellement ici, mais à partir de notre perception, de ce que nous vivons et non pas à partir de ce que les gens de l'extérieur pensent voir et essaient de rapporter et de dire d'une manière superficielle” ajoute Rene Silva. D'autres jeunes de sa favela viennent le rejoindre pour former une équipe de reporters. En 2010, la police envahit de nombreuses favelas de Rio lors des violentes opérations de "pacification". Rene tweete sur l'occupation en temps réel et est relayé par tous les grands médias car il est l'un des seuls à pouvoir témoigner de l'intérieur. Il développe son média dans 15 autres favelas de Rio. Chaque édition de son journal est tirée à 15 000 exemplaires. Rene soutient et crée aussi de nombreux projets sociaux pour ces communautés.
Lula investi président du Brésil pour la 3e fois
Son histoire fait le tour du monde: il reçoit de nombreux prix, donne des conférences et porte la flamme olympique. Mais le travail de Rene est toujours menacé: en 2016, il est arrêté par la police avec son frère alors qu’ils faisaient un reportage sur une expulsion. En 2019, le gouverneur de Rio Wilson Witzel et le président Jair Bolsonaro arrivent au pouvoir et encourageant la militarisation des favelas. Leur politique favorise l'impunité de la police. Résultat : près de cinq personnes sont tuées chaque jour par la police à Rio. Ce sont les pires statistiques jamais enregistrées. “La situation qui se produit ici est une énorme guerre entre la police, qui veut dominer un territoire abandonné pendant de nombreuses années par l'État, et ce territoire aujourd'hui occupé par les gangs, par les résidents, par toute la population qui vit ici. Donc, quand la police arrive ici, quand le gouvernement arrive ici, ils ne viennent pas avec les autres activités, dans le domaine social, culturel ou éducatif, par exemple... Ils viennent seulement avec dans le domaine de la police, dans la sécurité publique” indique Rene Silva.
Le peuple Krahô dénonce la politique du Brésil à l’encontre des populations indigènes
“Le but de ma vie est donc de contribuer à la transformation sociale de cet endroit et d'aider d'autres favelas, d'autres endroits qui vivent dans cette vulnérabilité à voir leur vie se transformer”. En donnant la voix à sa communauté, Rene Silva a contribué à casser les clichés qui collaient à la peau des habitants des favelas brésiliennes. “Dans ces petites actions, ces petites attitudes, les gens ont commencé à se voir différemment : l’estime de soi des gens a beaucoup changé. Les gens de la communauté ont commencé à se sentir beaucoup plus prestigieux. Les gens ont commencé à sentir: "Nous pouvons faire quelque chose, nous pouvons changer notre réalité, nous pouvons aller dans d'autres endroits du monde." Les gens ont commencé à avoir plus d'espoir par rapport aux choses horribles qui se passaient ici”. Son combat, Rene Silva le raconte dans le film BIGGER THAN US, qui sort en salles le 22 septembre 2021.
Une loi anti-racistes pendant les matchs de foot au Brésil