Pendant le confinement, l'excision en forte augmentation en Somalie

En Somalie, des femmes font du porte-à-porte pour proposer l'excision sur les jeunes filles, une pratique en augmentation "massive" pendant le confinement. "Ce n'est qu'un business", déplore l'ONG Plan International.

Pendant le confinement, l’excision a connu une très forte hausse en Somalie


Les filles ayant dû rester chez elles, elles ont été plus vulnérables face aux exciseuses. L'ONU estime que 290.000 filles subiront une forme de de mutilation sexuelle cette année en Somalie.


En Somalie, les mutilations sexuelles sur les jeunes femmes sont en augmentation « massive », selon l'ONG Plan International. « La Somalie est l'un des pays qui pratiquent le plus l'excision. 80 % de nos filles subissent entre l'âge de 5 et 11 ans. En ce moment, les mesures de prévention contre le Covid-19 ont accentué cette pratique qui est malheureusement encore légale », indique Sadia Allin, responsable de l'ONG Plan International en Somalie.


« Les parents considèrent que c'est un moment opportun pour l'intervention »


C'est l'une des conséquences du confinement : pour gagner leur vie, des femmes font du porte-à-porte pour proposer l'excision, une ablation partielle ou totale des organes sexuels externes de la femme, pratiquée à des fins non médicales. « L'impact du Covid-19 a obligé les filles scolarisées à rester chez elles et ça a augmenté leur vulnérabilité face à de multiples formes de violence dans leurs propres familles, dont les excisions », ajoute Sadia Allin.


Traditionnellement, les excisions sont pratiquées pendant les vacances scolaires et pendant la saison des pluies dans les zones rurales. À ce moment-là, les filles sont obligées de rester chez elles. « Les parents considèrent que c'est un moment opportun pour l'intervention et qu'il est propice à la guérison », explique la responsable de Plan International.


En Somalie, l’excision est considérée comme une manière de préserver l'honneur de la famille


La crise économique a par ailleurs motivé les exciseuses à recourir à cette pratique : l'opération peut rapporter entre 10 et 20 euros. « Elles frappent aux portes pour couper les filles, chez moi y compris. Dans le passé, nous pouvions dire que les exciseuses n'étaient conscientes des conséquences néfastes de cette pratique et qu'elles le faisaient pour servir l'honneur de la famille. Mais aujourd'hui, elles sont pleinement conscientes des dégâts qu'elles causent aux filles et pour elles, ce n'est qu'un business », déplore Sadia Allin.


En Somalie, l’excision est considérée comme une manière de préserver l'honneur de la famille – un élément essentiel de la culture et de l'identité de genre des filles – une obligation sociale et une condition au mariage. « J'ai subi une excision à l'âge de 8 ans, témoigne une jeune fille. Je souffrais énormément et j'ai dû rester au lit plusieurs jours à cause des points de suture. Mes jambes étaient liées pour ne pas que je bouge et que les points de suture restent en place. Je ne pouvais pas uriner normalement, je devais m'allonger sur le côté. »


Troubles psychologiques, sexuels, complications durant l’accouchement…


Ces mutilations sexuelles compliquent également les accouchements. « Quand le bébé arrive dans le canal de naissance, il ne peut pas sortir. Il arrive qu'il soit asphyxié et que l'on assiste à la naissance d'un mort-né. Il peut aussi subir des dommages cérébraux. Ou il faut l'extraire car la femme ne peut accoucher par les voies vaginales, en raison de son excision », explique la Dre Maryam Omar Salad.


L'excision est interdite par le droit international mais reste légale en Somalie. Cette pratique provoque des conséquences graves sur la santé des femmes, mais aussi des troubles psychologiques et sexuels, voire de l'infertilité. L'ONU estime que 290.000 filles subiront une forme de de mutilation sexuelle cette année en Somalie. « Les filles subissent cette expérience horrible à cause de la pression sociale. La pression sociale est plus importante que la santé et la vie des filles », analyse Sadia Allin.


« Les excisions sont considérées une condition au mariage et, dans la culture somalienne, le mariage apporte une sécurité financière et une acceptation sociale et, par conséquent, les filles qui ne sont pas excisées seront confrontées à la stigmatisation sociale », développe la responsable de Plan International.


200 millions de filles dans le monde sont excisées, dont 60.000 en France


Waris Dirie, une top-modèle somalienne elle-même excisée à l'âge de 5 ans, appelle à une mobilisation mondiale pour mettre fin à cette pratique. « Le monde s'en fout d'agir contre ça. 215 millions de femmes et personne ne s'en soucie. Ce n'est pas juste qu'il y ait tellement d'abus et que le monde reste assis et dise simplement : "Oui, oui nous le savons, c'est culturel." Non, ce n'est pas ça, c'est de l'abus sur des enfants, et un enfant est un enfant, peu importe où il est. Je ne peux pas l'accepter. »


On estime que 200 millions de filles dans le monde sont excisées, dont 60.000 en France. Cette pratique existe partout dans le monde, mais elle est plus fréquente dans 29 pays d'Afrique subsaharienne et au Moyen-Orient.


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