Alcoolisme : Charlotte Peyronnet raconte son histoire

"On pose toujours la question de pourquoi on ne boit pas mais jamais pourquoi on boit." Jusqu'à 30 ans, Charlotte était alcoolique. Alcoolique sans le savoir, pensant que ça n'arrivait qu'aux autres. Sobre depuis 3 ans, elle nous raconte son histoire, du premier verre à celui qui a failli la tuer.

Ce qui se passe, c'est que c'est que je dévale 18 marches à la renverse. La tête en sang et je ferme les yeux, j'ai pas du tout envie de les rouvrir. Je suis tellement au bout du bout, et c'est ma compagne, Ali, qui a entendu le bruit depuis chez nous, deux étages au-dessus et qui sait que c'est moi. Parce qu'elle pouvait être habituée à ce genre de choses. Elle me regarde et elle me dit : "Non mais là, Charly, c'est pas possible, t'as un problème d'alcool et tu vas sombrer, c’est certain si tu ne fais rien, tu vas emmener ton entourage avec et moi, je n'ai pas le droit de sombrer avec toi. Donc si tu ne fais rien, eh bien je partirai.” Et à ce moment-là, c'est le déclic, je me rends compte que c'est la seule personne qui compte encore pour moi, et cette personne est capable de se barrer à cause de ça”. Jusqu’à ses 30 ans, Charlotte Peyronnet était alcoolique. Cela fait aujourd’hui 3 ans qu’elle est sevrée. Un combat dont elle parle dans son livre “Et toi, pourquoi tu bois ?” publié aux éditions Denoël. 

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“Ce n'est pas juste banal de boire de l'alcool”


Lorsqu’elle fait cette chute, Charlotte Peyronnet ne réalise pas qu’elle est alcoolique. Il lui a fallu du temps pour le comprendre: “J'ai mis énormément de temps à réaliser que je pouvais avoir un problème avec l'alcool parce que pour moi, l'alcoolique, ce n'était pas moi. C'était pas une jeune femme de 30 ans, où finalement, quand on regarde, rien déconne sur le papier. Mais en fait, c'est des conneries. La gueule de de l'alcoolique, elle n'existe pas. Il y a tous les profils. En fait, ça n'épargne personne. Il n'y a aucune raison que l'alcool épargne une classe sociale plus qu'une autre, c'est tellement ancré chez nous”. L’alcool s’est immiscée dans son quotidien de manière “naturelle”. “En fait, tout a joué un rôle dans mon alcoolisme. Je ne suis pas tombée dedans comme Obélix tomberait dans la marmite. J'ai commencé à boire, mais comme plein de gens. Mon premier verre a été pris en famille pendant un repas de Noël. Je commence de manière ultra classique en France. Après, je bois pour être cool. Et j'arrive en école d'ingénieurs en agriculture. Alors là, j'embrasse le patrimoine mais je n'ai pas tellement le choix, en fait. Je me rends compte que si je veux me faire des potes, et c'est évidemment mon souhait à 18 ans, eh bien, ça passe par boire”. 

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Pour la jeune femme, ce qu’il manque, c’est de la communication sur l’alcool et encore plus de prévention sur ses dangers : “J'ai passé cinq ans dans cette école et je n'ai pas eu un mot de prévention, mais pas un. J'ai vraiment pas envie de blâmer qui que ce soit, parce que tant mieux pour les gens qui boivent et qui connaissent le mot modération. Franchement, j'ai vraiment pas vocation à ni fracasser le patrimoine français ni à ce que tout le monde arrête de boire. Mais il y a ce truc d’en parler et de dire que ce n'est pas juste banal de boire de l'alcool, de se rendre compte de ce qu'on fait, on boit par mimétisme, on boit pour s'intégrer, on commande des verres, on ne sait même pas pourquoi on les commande, mais juste, en fait, c'est tellement ancré. Si on arrivait à juste en parler de manière un peu légère dans notre discours, alors peut-être pas quotidiennement, mais que ce soit intégré de manière légère, mais moi, je suis sûre que comme ça, en fait, on éviterait quelques comportements addictifs”. 

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Avant, j'avais du courage liquide et maintenant, je puise du courage notamment dans mon entourage. Et puis beaucoup en moi aussi


Arrêter de boire ne veut pas dire arrêter de sortir, ni “heureusement, de vivre, sinon ça aurait été la double peine” commente Charlotte Peyronnet. Elle est encore aujourd’hui accompagnée par son addictologue. “Alors, il y a des moments où juste on n'anticipe pas et ça peut arriver d'avoir envie de boire, mais globalement, ça va super bien. Ça va tellement mieux, surtout. Il y avait plein de choses dont j'avais peur quand j'ai arrêté de boire : de devenir hyper chiante, de me dire “je ne pourrai plus jamais danser”, de me dire qu’à un repas de famille, je ne pourrai jamais y arriver sans alcool. J'anticipais vachement les moments en me disant: ben non, je n'y arriverai pas. Bah si, si. On a un petit dicton aux Alcooliques anonymes qui dit 24 heures à la fois. Pour ne pas se projeter trop loin. Je peux arrêter de boire pendant 24 heures et on verra ce qui se passe dans 24 heures. Mais en fait 24 heures plus 24 heures, plus 24 heures, je suis presque à 3 ans. Je danse sans alcool aujourd'hui. Ça demande parfois un peu de courage. Avant, j'avais du courage liquide et maintenant, je puise du courage notamment dans mon entourage. Et puis beaucoup en moi aussi. Il faut réapprendre beaucoup de choses, c'est certain. Presque tout, parce qu'en fait, de mes 13 ans à mes 30 ans, j'ai eu l'alcool, donc je me suis vraiment construite avec ça et donc il a fallu réapprendre beaucoup, beaucoup de choses”. 

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