Tuto : ce que l'on peut faire en manifestation

Filmer les forces de l'ordre, porter une écharpe, avoir un gilet jaune dans son sac…

Le guide du parfait petit manifestant


Brut est allé à la rencontre de la YouTubeuse spécialiste en droit Camille Décode. Avec elle, vous saurez tout sur vos droits en tant que manifestant.


Est-ce que je peux manifester comme je veux ?


La liberté de manifestation découle de la liberté d’expression. Toutes les personnes qui bénéficient de la liberté d’expression ont forcément la liberté de manifester, qu’elles soient majeures ou mineures. Le droit de manifester est un droit fondamental. On peut donc manifester pour tout type de revendication, qu’elle soit religieuse, sociale, environnementale, politique, etc. 


En revanche, il faut faire attention : dans certaines professions, la liberté de manifestation est encadrée, voire limitée. Dans certains corps de métier en effet, vous avez un devoir de réserve. C’est le cas, notamment, des magistrats ou des militaires.


En principe, en France, avant toute manifestation, il faut faire une déclaration préalable auprès de la mairie ou de la préfecture de police. Si une manifestation est interdite par la mairie ou par la préfecture, il est toujours possible de faire un recours, c’est-à-dire de saisir un juge pour contester cette interdiction. Si, malgré tout, la manifestation est interdite mais que vous vous y rendez, des sanctions sont possibles pour l’organisateur et pour les manifestants. 


En principe, la manifestation doit prendre fin à l’heure prévue dans la déclaration préalable. À l’heure de fin, les manifestants sont censés se disperser. S’ils ne le font pas, les forces de l’ordre vont les inviter à le faire, en principe avec des sommations, même si dans certains cas, elles ne sont pas obligatoires. 


Qu’est-ce que je peux emporter en manifestation ?


Une manifestation, c’est avant tout une émanation de la liberté d’expression. Donc sur le principe, oui, vous pouvez chanter ce que vous voulez, vous pouvez brandir les pancartes que vous voulez. Mais là encore, il y a des limites. Par exemple, sur les pancartes, il faut faire attention aux inscriptions. Être dans une manifestation ne vous empêche pas d’être poursuivi pour incitation à la haine, pour apologie du terrorisme, pour appel à la violence, etc.


Il est interdit de se dissimuler intégralement le visage dans l’espace public, en manifestation ou hors manifestation. Si vous le faites, vous vous exposez à une amende. Et en plus de ça, la loi considère comme délit potentiel le fait d’avoir le visage dissimulé, même partiellement. Cela concerne une simple écharpe ou un masque porté aux abords d’une manifestation ou dans une manifestation dans laquelle il y a des risques de troubles à l’ordre public.


Que peut faire la police pendant une manifestation ?


Avant toute chose, il faut rappeler que les forces de l’ordre sont là pour permettre la liberté de manifestation des personnes présentes, pour leur garantir une certaine sécurité et pour maintenir l’ordre public. Le recours à la force doit toujours se faire de manière nécessaire, justifiée et proportionnée. Cette question de la proportion ou de la disproportion du recours à la force ou l’usage d’une arme doit être appréciée par un juge.


Les contrôles d’identité sont très encadrés par la loi, il y a donc de multiples raisons qui peuvent justifier un contrôle. Par exemple, une flagrance : vous venez de commettre une infraction ou vous tentez d’en commettre une. Ça peut justifier un contrôle. De la même manière, il y a des contrôles réalisés à titre préventif pour éviter ce qu’on appelle des atteintes à l’ordre public. Et il y a aussi des contrôles qui vont être justifiés par ce qu’on appelle une réquisition du procureur de la République. C’est-à-dire que le procureur de la République va dire : « À tel endroit, de telle heure à telle heure, vous pouvez faire des contrôles d’identité en recherche de telle ou telle infraction. »


Les fouilles, c’est comme les contrôles d’identité : il y a énormément de règles. Ce qu’il faut savoir, c’est que le fait de se rendre dans une manifestation avec une arme, c’est un délit, et c’est susceptible de poursuites. À titre préventif, il va donc y avoir des fouilles pour vérifier les affaires des individus et s’assurer qu’ils ne sont pas détenteurs d’une arme.


Si jamais, en fouillant dans vos affaires, on s’aperçoit que vous êtes détenteur d’une arme, vous pouvez faire l’objet de poursuites. C’est dans le cadre de cette procédure qu’on va saisir cette arme. En revanche, si on trouve dans votre sac des lunettes, du sérum physiologique ou un gilet jaune, ça risque d’être un petit peu plus compliqué de démontrer qu’il s’agit d’une arme, même par destination. Donc, sur le principe, on ne peut pas vous contraindre à vous dessaisir de ces objets ni à vous les prendre par la force. En tout cas pas en dehors d’une procédure et d’un certain nombre de garanties.


Si je me fais interpeller, à quoi m’attendre ?


En réalité, il existe une multitude de motifs pouvant justifier une interpellation. Par exemple, si vous refusez de vous soumettre à un contrôle d’identité ou que vous n’êtes pas en mesure de justifier votre identité, vous pouvez être amené au commissariat pour que les officiers de police judiciaire vérifient votre identité. De la même manière, si vous êtes pris en flagrant délit, en train de commettre une infraction ou de tenter de commettre une infraction, vous pouvez être interpellé, voire placé en garde à vue.


En l’état actuel, la France n’a pas fait le choix d’interdire la technique d’immobilisation du plaquage ventral, mais la Cour européenne des droits de l’Homme a pour sa part émis un certain nombre de réserves quant au recours à cette technique. 


Quels sont mes droits face à la police ?


Si un manifestant ou une personne considère que ses droits ont été violés, il ou elle a toujours la possibilité d’aller en référer à un avocat, de porter plainte au commissariat, de saisir l’IGPN, de se rapprocher d’une association de défense des droits, et même de saisir le Défenseur des droits. Les preuves peuvent être des images qu’on a prises soi-même ou qu’on a retrouvées sur Internet. On a le droit de prendre en photo et même de filmer les forces de l’ordre, à condition que ces images ne portent pas gravement atteinte à leur vie privée, ou qu’il n’y ait pas d’incitation à la haine, d’appel à la violence, etc. 


Au-delà de ça, il ne faut pas oublier qu’en principe, la plupart des agents des forces de l’ordre sont dans l’obligation de porter ce qu’on appelle un RIO, le Référentiel des Identités et de l’Organisation. C’est un numéro attribué à la plupart des agents des forces de l’ordre qui doit permettre leur identification. Quand vous avez une altercation avec un agent des forces de l’ordre, vous pouvez tout à fait relever son RIO, puisqu’il est en principe obligé de le porter.


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