Bernard, 1m30, raconte son quotidien

"Les mots du médecin pour annoncer mon handicap à mes parents, c'était : 'Bernard, ça sera un nain de cirque.' Un nain de cirque !" Bernard fait 1m30. Il raconte.
Publié le
7/7/2020
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« Il y a quand même très souvent des personnes qui me posent la question : “Mais Bernard, comment tu fais pour conduire ?” Regardez, c’est très simple. J’ouvre la porte. Je m’installe. Et voilà ! » En relatant ce genre de situations tout à fait banales, Bernard, 1,30m, entend faire comprendre au plus grand nombre que son quotidien n’est pas foncièrement différent du leur. En 2015, il lance sa propre chaîne YouTube, « La vie ordinaire d’une personne de petite taille » pour casser les clichés sur le nanisme. Brut l’a rencontré.

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“Ma mère m’a toujours dit : ‘’Tu es trop petit, débrouille-toi tout seul !’’”


Les mots que le médecin a utilisés pour qualifier la petite taille à mes parents, pour leur annoncer mon handicap, c’était : “Bernard, ça sera un nain de cirque. Un nain de cirque ! » Comment on peut qualifier une personne comme ça ? C’est humiliant, c’est n’importe quoi. On est des personnes comme tout le monde. Je ne travaille pas dans un cirque. Je travaille dans une entreprise normale dans le secteur de la communication, et voilà” déclare le principal concerné.

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Depuis qu’il est enfant, il a appris à se débrouiller seul. “Ma mère m’a toujours dit : « Tu es trop petit, débrouille-toi tout seul ! Monte sur une chaise, fais quelque chose, mais tu peux te débrouiller. Il n’y a pas de soucis, il y a toujours une solution. »” C’est à l’entrée du CP qu’il prend conscience de son handicap. “En maternelle, tout est petit, tout est à petite échelle. De petites chaises, de petites tables, ça allait encore. Par contre, quand vous arrivez sur les bancs du CP et que vous découvrez qu’il faut se hisser sur la chaise pour pouvoir monter sur le bureau, là, vous vous dites : « Ah, il y a peut-être un petit souci. »” explique Bernard.

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“J’ai eu des coups de cœur, mais à chaque fois, c’était un refus”


“Il y a un point qui a peut-être marqué encore plus mon handicap, c’est la période des premières amours. La plupart des copines avec qui je voulais sortir étaient beaucoup plus grandes que moi. Quand on est à l’adolescence, on est un peu bête, on se construit et on ne veut pas forcément sortir avec une personne plus petite. Même si j’étais toujours la personne très gentille, même si j’étais toujours le copain toujours là, l’épaule sur qui on pouvait compter si jamais on pleurait, si jamais on avait des soucis de cœur…” se souvient Bernard.

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Il se rappelle avoir “tenté à plusieurs reprises”, avoir “eu des coups de cœur, eu des émois. Mais à chaque fois, c’était un refus”. Son “premier bisou” arrive à l’âge de 24 ans. “C’est vrai que ça fait tard, mais j’avais croisé une fille qui était plus ouverte d’esprit. À 24 ans, tu réfléchis un peu plus”.


“Au travers de mes vidéos, j’ai vraiment envie qu’on découvre mon quotidien”


A travers sa chaîne YouTube, « La vie ordinaire d’une personne de petite taille », et ses vidéos, il espère faire découvrir son quotidien. “Qu’une personne qui se retourne sur moi dans la rue se dise : « En fait, il est petit comme Bernard, que je connais ! » Il y a des gens qui vont me poser une question face à des copains, et la première réaction des copains, ce sera : « Mais il est complètement bête de poser cette question. » Non, il n’est pas bête, il ne sait pas. Toi, ça fait 15 ans que tu m’as comme pote, ça fait 15 ans que tu « vis » avec moi. Ça fait 15 ans que tu connais mes difficultés, ça fait 15 ans que, par exemple, quand je vais au cinéma, c’est toi qui me donnes mon ticket parce que le guichet est trop haut”.

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Il se souvient un jour avoir croisé un enfant dans un supermarché qui était avec sa mère. “Je faisais mes courses comme une personne normale. L’enfant m’a pointé du doigt et a dit à sa maman : « Regarde le monsieur comme il est petit. » En voulant faire de l’autodérision, je lui ai dit : « Ça, c’est parce que je n’ai pas mangé assez de soupe, donc méfie-toi, parce que si tu ne manges pas ta soupe, il risquerait de t’arriver la même chose. » La maman a explosé de rire, mais gentiment, et j’ai senti qu’elle rentrait dans mon jeu. Le gosse, il ne savait plus quoi dire, il était choqué que sa mère rigole, il était choqué que je rigole aussi. La mère est venue me voir en me disant : « Il y a une chose dont je suis sûre, Monsieur, c’est que, quand il sera grand, j’espère qu’il aura votre humour. » J’ai tout gagné”.

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