Un jour avec le danseur étoile Guillaume Diop

"Je suis content pour les générations futures, pour les enfants qui peuvent se reconnaître en moi et qui ont ce que je n'ai pas eu." À 23 ans, il est étoile à l'Opéra de Paris. Une première pour un danseur noir. Pour Brut, notre journaliste Cécile Guthleben a passé une journée avec Guillaume Diop.

“Ça pouvait être mon métier et que j'avais vraiment envie de le faire.”

L’Opéra de Paris est sa première maison. Guillaume Diop est danseur étoile. Il commence la danse à l’âge de 4 ans, motivé par sa sœur qui pratiquait déjà cet art. Mais c’est à 8 ans qu’il commence sérieusement à pratiquer la danse classique. “Ça m'a mis du temps à vraiment conscientiser le fait qu'être danseur, ça pouvait être un métier et que j'avais vraiment envie de le faire.” 

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Très studieux, il souhaitait, au départ, devenir médecin. “Je me suis vraiment dit: ‘ok, maintenant, Guillaume, tu te donnes les moyens pour être danseur à l'Opéra’. C’était vers 15 ans, je pense. Ça m'a fait du bien de ne pas être dans cette optique-là trop jeune, parce que ça m'a préservé aussi un peu. Et c'est grâce à mes parents. Ils me disaient tout le temps : ‘mais continue l'école, c'est important. Il faut que tu aies des bonnes notes, et tout, parce que tu ne sais pas ce qu'il peut arriver.’ Et du coup, même si j'étais à l'école de l'Opéra, ça m’a permis de garder la vraie raison pour laquelle je dansais, c'est-à-dire parce que ça me faisait plaisir et parce que ça me permettait de m'exprimer”. 

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Car avec la carrière de danseur vient aussi la pression de l’âge. “La carrière d'un danseur est courte et on a toujours cette pression de l'âge, tu vois, au-dessus de nous, de se dire, genre: ‘Si à 25 ans, je ne suis pas premier danseur ou sujet... Il faut absolument que je sois danseur étoile avant 30 ans.’ Et du coup, on a toujours ce stress où on a toujours peur de rater le bon moment ou de rater sa chance.”

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“Ma situation était quand même anxiogène”

Lors de chaque entraînement, Guillaume Diop prend le soin de toujours bien faire ses échauffements. “Le plus sérieusement tu t'échauffes, le moins tu as des risques de te blesser. J'ai eu une grosse blessure l'année dernière. Je me suis fait une fracture de fatigue au tibia. J'ai trop poussé dessus, ma situation était quand même anxiogène, dans le sens où je faisais des rôles, on me donnait des opportunités, j'avais l'impression que je ne pouvais pas laisser passer ma chance, et j'avais super mal et j'ai continué de danser dessus jusqu'au point où je n'arrivais presque plus à marcher”. 

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Au mois de mars dernier, Guillaume Diop a été nommé étoile, faisant de lui le premier danseur racisé à décrocher ce titre. “C'est fou, parce que c'est arrivé il y a trois mois, maintenant, et je n'ai pas l'impression d'avoir digéré encore toutes les informations qui viennent avec cette nomination. Je suis content que ça arrive, je suis content pour les générations futures, pour les enfants qui peuvent se reconnaître en moi et qui ont ce que, finalement, moi, je n'ai pas eu. C'est en ça que je trouve ça génial. Du jour au lendemain, j'ai reçu énormément d'amour et, malheureusement, aussi beaucoup de choses négatives et ça m'a affecté. Mais j’essaie de m'accrocher à l'amour et de me dire que la meilleure façon d'être le symbole de ça, d'être le premier danseur étoile noir de l'Opéra, c'est en dansant, en continuant d'être qui je suis et de ne pas chercher à changer que je suis ça, maintenant.

Guillaume Diop devient le premier danseur étoile noir de l’Opéra de Paris, c’est une première pour l’institution en 300 ans d’existence.


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