Avec le collectif Front de Mères des Quartiers populaires

"Ça me crève le coeur de le dire: on m'a poussé à faire sortir mes enfants de leur monde de Bisounours." Mères de famille, la situation de leurs enfants les inquiète. On a rencontré les femmes du collectif Front de Mères pour discuter de l'avenir des jeunes dans les quartiers populaires.

L’avenir de la jeunesse dans les quartiers populaires en France en questionnement

Au sein du collectif Front de Mères des Quartiers populaires, ces femmes et mères se retrouvent pour discuter de l’avenir de la jeunesse dans les quartiers populaires en France, après la mort du jeune Nahel, décédé le 27 juin, suite au tir mortel d’un policier. “Nous, en tant que mères, on se dit : purée, demain, ça arrivera à nos enfants”, s’inquiète Anissa Baaziz, membre du collectif. Une vision que partage Fatima Ouassak : “Tu te dis : 'mais en fait, cet enfant-là, demain, ça peut être le mien. Parce qu'il a la même tête que mon enfant, il a les mêmes vêtements, il a les mêmes petites bêtises'”. 

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Elle revient notamment sur le discours d’Emmanuel Macron, appelant ainsi à la “responsabilité des parents” lors des émeutes, après la mort de Nahel. “Quand Emmanuel Macron dit: ‘la responsabilité des parents’, nous, on est bien placés ici pour dire: ‘mais nous, oui, on parle de responsabilité collective des parents’. On demande que ça, que de s'auto-organiser pour faire en sorte que nos enfants aient une belle vie, soient heureux, heureuses... Nous, on veut justement que nos enfants soient heureux”

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“J’ai peur pour les enfants”

Goundo Diawara explique que “ces violences”, ces “contrôles” et ces “répressions” existent. “Sauf qu'à chaque fois qu'on a des images, c'est le même choc. On ne peut pas s'habituer à ça.” Pour sa part, Kaméra Vesic a “peur pour ses enfants, ceux des autres mais aussi de la répétition et de la lassitude.” Mais elle craint que le débat soit vite clos : “On se bat, on fait des choses, ça passe à la télé, on met le sujet sur la table. Enfin, on peut parler des quartiers populaires et tout, mais on va passer à autre chose. Ça va être comme en 2005”

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Anissa Baaziz, mère de deux enfants de 8 et 10 ans s’inquiète de la situation dans laquelle ses enfants vont évoluer : “C'est des Algériens avec le faciès d'Algériens. Ils ont bientôt 9 ans et bientôt 11 ans. Faut être réaliste à un moment donné. On se rend compte qu'aujourd'hui, nos enfants vont évoluer dans ce genre de situation, d'atmosphère, donc il faut leur donner les billes. Et nous, en tant que parents, on est là pour former nos enfants. Alors, d'un côté, tu dois les former et de l'autre côté, tu dois les sortir de leur monde de Bisounours, parce que tu as envie de les garder le plus longtemps possible dans leur petite bulle d'enfants, tout simplement. Sauf que ce n'est pas leur rendre service. Mais de l'autre côté, en tant que maman ou en tant que papa, ça arrache le cœur. Tu te dis : 'il faut vraiment leur expliquer la réalité des choses'. Et ça me crève le cœur, vraiment, de le dire: 'on m'a poussée à faire sortir mes enfants de leur monde de Bisounours.' Je suis désolée. À presque 9 et presque 11 ans : non”. 

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“On exige de nous une perfection”

Pour Magda Jouini, “on exige de nous une perfection, alors qu'en face, en réalité, on n'a pas les moyens et ça n'existe pas. Ce sont des jeunes qui ont le droit de faire leurs erreurs. Au même titre que nous, maintenant devenus adultes. C'est ce qui nous a forgés, c'est ce qui nous a construits. Et là, on a peur pour la génération d'après. Et on se dit : 'c'est de pire en pire.'” Goundo Diawara, elle, indique que personne ne se réjouit des dégradations et des violences survenues depuis quelques jours. Selon elle, “il n’y a aucune volonté politique derrière à ce qu’il y ait un changement.”

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Face à ces tensions et les récents évènements, Fatima Ouassak explique ressentir une “chape de plomb” notamment dans les débats télévisés, qui ne semblent tolérer aucun débordement : “Faudrait pas que je dise vraiment ce que je pense parce que: ‘Ah tu es une maman irresponsable! Tu te rends pas compte!’ ‘Quoi ? Ça veut dire que tu te réjouis des émeutes ?’ ‘Quoi ? Ça veut dire que tu considères que brûler des voitures, c'est secondaire?’ Oui, brûler des voitures, c'est très, très secondaire. Ce qui compte, c'est la vie de Nahel. Ce qui compte, c'est la vie humaine. Mon espoir, moi, depuis ce qui me tient, c'est ça, c'est de me dire: ‘peut-être que cette fois, ça va être un vrai tournant, on va s'organiser dans les quartiers populaires, on va s'auto-organiser, et qu'on va le faire ensemble et on va faire grandir nos enfants ensemble.” 

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Pour elle, la recette miracle n’existe pas. Il faudrait plutôt “occuper le quartier, faire en sorte qu’il y ait moins de violences policières, inter-quartiers, sexuelles que subissent les enfants au sein même des foyers car elle facilite la circulation entre l'intérieur et l'extérieur. La seule solution, c'est nous qui l'avons. Ce n'est pas aux enfants de baisser la tête ou pas. Parce qu’on les enferme, eux, dans un dilemme”. 

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