Elles veulent briser le tabou autour de l'infertilité
Quelles sont les conséquences de l'infertilité ?
En France, un couple sur six est touché par l’infertilité. Julie Fichera et Caroline Vigoureux ont écrit le livre, “Tout s’est bien passé, merci. Récit sur l’infertilité”. Un titre qui n’a pas été choisi par hasard. “On a pris l'habitude, l'une et l'autre, de répondre ça quand on nous posait la question, soit sur la grossesse, comment elle se passait, ou soit comment ça s'était passé” explique Julie Fichera. “Il y a plein de remarques insignifiantes des uns et des autres et qui sont évidemment bienveillantes, mais du type : "Et vous, c'est pour quand ?" "Bah alors, quand est-ce que vous vous y mettez ?" Et on ne peut pas se mettre à répondre aux gens : "Ben en fait on essaie, mais on n'y arrive pas. Parce que ça me faisait trop souffrir et puis parce que j'étais trop pudique pour répondre ça. Ca m'aurait gênée de me mettre à dire à un collègue : "Bah en fait, justement, tu tombes bien, c'est le sujet de ma vie en ce moment et c'est devenu complètement obsessionnel" indique Caroline Vigoureux.
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Dans leur livre, elles souhaitaient parler du “quotidien de l’infertilité, de la vie avec l'infertilité, tout ce que ça procure chez nous, dans notre couple, dans nos relations aux autres, au travail, à nos amis, c'est… C'est quelque chose qui régit, en fait, notre vie, en tout cas une tranche de vie” affirme Caroline Vigoureux. “C'est la question centrale et c'est le sujet central et on s'organise autour de cette question-là, autour du parcours médical, par exemple les piqûres, il faut les faire précisément à un moment dans la journée, à la même heure… Notre quotidien s'organise autour de ça” ajoute Julie Fichera.
“Parfois, je me disais ‘mais merde, je suis un monstre, en fait’”
Elle a 16 ans lorsque Julie Fichera apprend qu’elle a des problèmes de fertilité. Elle découvre alors qu’elle est atteinte du syndrome MRKH, “qui fait que j’ai un cycle ovarien classique, mais je n’ai pas d’utérus, donc pas de possibilité de porter un enfant”. “Moi, c'est tout l'inverse. Je suis tombée enceinte sans le vouloir quand j'avais 20 ans et donc j'ai eu recours à une interruption volontaire de grossesse, et donc j'ai plutôt, de mes 20 à mes 30 ans, évolué avec la peur de tomber enceinte, et j'en avais tiré la conviction que j'étais très fertile et que je devais vraiment faire attention à ça, et en fait le jour où j'ai voulu être enceinte, je n'ai pas réussi à l'être” déclare Caroline Vigoureux. A 32 ans, avec son mari, après plusieurs mois d’échecs, la jeune femme fait des tests d’infertilité. “Et on a constaté que lui avait un problème de mobilité des spermatozoïdes qui expliquait que je ne tombais pas enceinte”.
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Parler de l’infertilité aujourd’hui en France reste encore un sujet tabou selon les deux autrices. “La question de savoir c'est quoi, vraiment, l'infertilité, à quel moment je dois m'inquiéter, à quel moment je dois aller faire des tests, c'est des notions qui sont assez floues. Moi, parfois, je me disais "mais merde, je suis un monstre, en fait", quand certaines de mes amies m'ont annoncé leur grossesse, je pleurais, mais je pleurais pas que de bonheur pour elle, je pleurais tellement ça me renvoyait à ma situation et à ce que moi je ne parvenais pas à avoir, et donc ça fait partie selon moi de tous les sentiments un peu inavouables qu'on peut avoir quand on est confronté à l'infertilité, où en fait, tout ce qui touche aux grossesses des autres devient un sujet hyper sensible et hyper douloureux” explique Caroline Vigoureux.
"Peut-être que ça aidera des femmes qui sont dans ce parcours à être moins seules"
Julie Fichera a décidé de son côté d’avoir recours à une GPA. “Je sais que c'est clivant comme sujet, que tout le monde a un avis sur la question, et du coup, il y a aussi une part de jugement, on se dit "qu'est-ce qu'il vont penser ? ils vont se dire qu'on fait ci comme ça, on paie pour avoir un enfant." Caroline Vigoureux a elle eu recours à une PMA. “En fait, c'est toujours un point de vue médical et scientifique, avec des chiffres, avec une réponse très précise, mais effectivement sur intimement qu'est-ce que ça procure, chez les femmes comme chez les hommes, on en parle très peu” considère Julie Fichera.
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“J'ai eu quelques messages de femmes, surtout, dans ce cas-là, qui m'ont dit "merci pour votre témoignage parce que je vis ça aussi depuis plusieurs années mais je n'en parle pas, et ça fait du bien de voir que d'autres personnes vivent ça" affirme Caroline Vigoureux. “Et c'est aussi pour ça qu'on a voulu écrire le livre, on s'est dit "peut-être que ça aidera des femmes qui sont dans ce parcours à être moins seules" ou en tout cas à se dire "certaines l'ont traversé aussi, et je m'y retrouve un peu là-dedans" ajoute Julie Fichera.