Ukraine : 4 questions simples sur les crimes de guerre

Vladimir Poutine est accusé de crimes de guerre en Ukraine. Qu’est-ce que les crimes de guerre et qui les juge ? Une avocate nous explique.

1/ C’est quoi un crime de guerre ?


Le 3 mars 2022, la Cour pénale internationale (CPI) a ouvert une enquête ayant pour but d’étudier de potentiels “crimes de guerre” perpétrés par le président russe, Vladimir Poutine, en Ukraine à la demande de plus de 40 Etats.


Qu’est-ce qu’un crime de guerre et qui le juge ? Me Jeanne Sulzer est avocate et responsable de la Commission Justice internationale d’Amnesty International France. Elle nous explique.


Me Sulzer : “C’est un crime qui est codifié par le droit international humanitaire, ça s’appelle les Conventions de Genève, qui ont été rédigées et adoptées par les Etats après la seconde guerre mondiale en 1949.


Les crimes de guerre, c’est lorsqu’il y a des violations graves à ce droit international humanitaire et notamment lorsque les crimes visent les populations protégées à savoir les civils ou les prisonniers de guerre, par exemple une attaque délibérée sur une école ou sur un hôpital.


Dès lors que l’on sait que ces endroits sont des cibles où la population civile peut se trouver, ces éléments peuvent être constitutifs comme un crime de guerre. Dès lors que c’est aussi indiscriminé et que ça vise pas spécifiquement des infrastructures militaires ou des groupes armés.”


Les mots “guerre” et “invasion” sont des mots interdits pour les journalistes en Russie. Ces derniers risquent jusqu’à 15 ans de prison si le gouvernement russe considère qu’ils relayent de “fausses informations” sur le conflit. Voici comment les médias russes traitent la guerre en Ukraine.


2/ Comment peut-on prouver un crime de guerre ?


Me Sulzer : “On essaye d’enquêter déjà sur la réalité des faits. Donc sur les victimes, est-ce qu’il y a eu vraiment volonté de commettre un crime de guerre ? Est-ce qu’il y a eu une attaque ? Est-ce qu’il y a des preuves de cette attaque ? Ça peut être des vidéos, des témoignages, des preuves documentaires qu’on retrouve en général après sur des ordres, des documents aussi issus des forces armées. Au départ on prouve ça. La réalité du crime.


Une fois qu’on a prouvé qu’il y avait eu un crime qui a été commis, il faut remonter la chaîne de commandement. Ca c’est le plus difficile. Donc il faut connaître et comprendre la structure de la chaîne de commandement militaire, remonter petit à petit les échelons pour comprendre qui a donné l’ordre, sur quelle base…


Donc on prouve en droit pénal à la fois un élément matériel : le fait. Et un élément moral aussi : l’intention. Et lorsque les deux sont réunis on peut réussir à démontrer et émettre éventuellement un mandat d’arrêt. Ce qui est important en fait là c’est de préserver les preuves.”


Dans la nuit du 23 au 24 février 2022, la Russie a déclaré la guerre à l’Ukraine en envahissant les territoires, en déployant son armée et en bombardant le pays. Retour sur ce qu’il s’est passé le premier jour de la guerre en Ukraine.


3/ Vladimir Poutine pourrait-il être un jour jugé ?


Me Sulzer : “Juridiquement oui. Il le peut parce que devant la Cour pénale internationale il n’y a pas d’immunité pour les chefs d’Etat. On considère que pour les crimes de droit international de cette nature, il n’y a pas d’immunité qui existe.


On a vu Laurent Gbagbo a été jugé, finalement il a été acquitté mais il a été jugé devant la Cour pénale internationale. Devant d’autres juridictions internationales, il y a eu Charles Taylor qui a été poursuivi et qui a été condamné ; Slobodan Milosevic, qui est mort avant son jugement mais… Donc c’est possible.


La difficulté c’est la coopération puisque la Cour pénale internationale n’a pas de police. Donc c’est absolument à 100 % sur les épaules des Etats de coopérer. Ce qu’il peut se passer c’est que les personnes qui pourraient être poursuivies, sur la base d’un mandat d’arrêt international, ne sorte pas d’un territoire pour éviter de se faire arrêter puis d’être remises à la Cour pénale internationale.”


Toujours en guerre, des Syriens manifestent en soutien aux Ukrainiens.


4/ Peut-on parler de génocide en Ukraine ?


Me Sulzer : “Là on demande à la justice d’intervenir en temps réel alors que les crimes sont en train d’être commis donc c’est à la fois difficile et dangereux, il faudra des enquêtes et le crime de génocide, c’est un crime qui est extrêment difficile à prouver puisqu’il faut définir l’intention de l’auteur de cette volonté de détruire tout ou partie un groupe protégé.


Donc je ne m’aventurerai pas sur cette question-là. Il appartiendra à la Cour pénale internationale ou aux autres autorités de poursuite de définir sur la base de preuves avec des enquêtes indépendantes et impartiales si une telle volonté de détruire existe.”


Photographe de guerre depuis 50 ans, Patrick Chauvel revient d’Ukraine. Il nous raconte.


Depuis le 24 février 2022, la Russie et l'Ukraine sont entrés en guerre. Le président de la Russie, Vladimir Poutine, a déclaré la guerre au pays par l'invasion de ses troupes russes sur le territoire ukrainien. Face aux attaques, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a rapidement appelé les Ukrainiens à prendre les armes. Le chef d'Etat ukrainien a également rappelé son souhait de rejoindre l'OTAN et l'Union européenne rapidement.


Des bombardements ont touché de nombreuses villes d'Ukraine, dont Kiev - Kiyv et Marioupol. Des civils ont été touchés. La population ukrainienne, en particulier les femmes et les enfants, ont fui vers les pays limitrophes comme la Pologne. Dans le monde, des manifestations anti-guerre se sont déroulées. A l'international, des sanctions contre Moscou et les oligarques russes ont été votées.


A Zaporijia, la plus grande centrale nucléaire d'Europe a fait l'objet de bombardements de la part de la Russie. La centrale nucléaire de Tchernobyl a également été la scène de conflit. Un risque de catastrophe nucléaire plane également depuis le début du conflit, Vladimir Poutine ayant déclaré plusieurs fois qu'il n'excluait pas d'utiliser l'arme nucléaire.


A la mi-mars 2022, selon l'Office français de l'immigration, environ 20 000 réfugiés ukrainiens avaient rejoint la France. D'autres pays de l'Union européenne ont accueilli des réfugiés ukrainiens comme l'Allemagne. Sur le terrain, les attaques et les combats entre les militaires russes et l'armée ukrainienne continuent.


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