Cette peine, conforme aux réquisitions de l'avocat général, est assortie de sept ans de suivi socio-judiciaire, avec une obligation de soins. Le non-respect de cette mesure entraînerait quatre ans de prison supplémentaire, a décidé la cour au terme d'environ quatre heures de délibération.
Jennifer Bertrand, 37 ans, n'a pas réagi à l'énoncé du verdict, gardant la tête baissée.
"Depuis que les deux personnes les plus importantes au monde pour moi sont parties, ma vie s'est arrêtée. Je les aime plus que tout et pour moi, (leur absence, ndlr) c'est la pire des sentences", avait déclaré plus tôt dans la journée l'accusée, la voix étranglée par l'émotion.
Cette femme qui dit avoir vécu une véritable "descente aux enfers" après la naissance de ses jumelles, a reconnu avoir, le 19 décembre 2022, posé leurs doudous sur le visage d'Ambre et d'Emma, avant d'appuyer avec sa main pendant "une minute environ", selon elle, pour les "calmer" alors qu'elles étaient "agitées".
L'échec" du traitement de sa dépression post-partum
"C'est un geste fort, un geste déterminé qui n'a rien de naturel", qui est "très loin du geste d'apaisement", a affirmé pour sa part l'avocat général Martin Viver-Darviot devant la cour d'assises.
"On peut se demander si ce doudou, posé sur le visage des nourrissons, n'avait pas pour objet de cacher leurs visages et de ne pas affronter le regard de ses filles qui, au-delà du fait de s'agiter, ont pu convulser", a-t-il ajouté.
À l'instar des experts psychiatriques, le représentant du ministère public a demandé aux jurés "d'écarter l'abolition du discernement" mais d'en retenir "l'altération", la mère étant alors "accaparée par ses souffrances personnelles".
"Épuisée", atteinte d'une anxiété "massive", incapable "de supporter les pleurs de ses enfants", elle "n'était plus en capacité de trouver de l'énergie pour ses filles", a-t-il estimé, en pointant "l'échec" du traitement de sa dépression post-partum.
"Impasse"
Après l'accouchement, cette mère avait passé deux mois dans une unité psychiatrique spécialisée et elle était toujours sous médicaments, suivie en hôpital de jour, au moment des faits.
Une période qu'elle décrit comme "une descente aux enfers". "Je me sentais nulle, nulle, j'avais envie de mourir", avait confié jeudi à la cour celle qui se renseigna aussi, à l'époque, sur l'adoption ou le placement des enfants.
"On peut se demander si Mme Bertrand n'était pas dans une situation d'impasse et que la solution qu'elle a trouvée, c'était de supprimer la principale source de ses angoisses", a supposé l'avocat général.
"Dix-huit ans ? Sérieusement?", lui a rétorqué l'un des avocats de la défense, Me Stéphane Guitard. La peine requise, "particulièrement lourde", "ne correspond ni aux standards, ni aux jurisprudences nationales" en matière d'"infanticides liés à des maladies mentales graves", a-t-il déclaré.
Le conseil a aussi plaidé l'abolition du discernement de l'accusée qui était dans un "isolement familial, psychologique et psychiatrique évident", à l'origine de son geste selon lui.
Jennifer Bertrand "n'avait pas la notion du temps et peut-être de l'espace, elle ne pouvait plus raisonner" et en aucun cas, "elle n'a voulu éteindre ses deux petits rayons de soleil", a martelé son autre avocat, Me Béatrice Ceccaldi.
Et de dépeindre une accusée "hantée, consumée" depuis le drame, une "ombre qui ne tient que (par) les médicaments".
Pour l'avocat du père des jumelles, qui a réclamé "une justice équilibrée", la maladie était "incontestablement" présente le jour du drame.
"On ne tue pas à midi pour commander à 13H00 des accessoires de puériculture qui ne serviront jamais. C'est irrationnel", a jugé Me Charles Dufranc, constatant aussi "un échec thérapeutique total" dans ce dossier.








