Après vingt jours derrière les barreaux, Nicolas Sarkozy a quitté la prison de la Santé pour rentrer chez lui, moins de deux heures après que la justice a ordonné sa mise en liberté.
Dans l'attente de son procès en appel, qui devrait se tenir à partir de mars devant la même juridiction, la cour d'appel de Paris a autorisé la sortie de l'ancien chef de l'Etat, 70 ans.
Interdiction d'entrer en contact avec Darmanin
Dans le cadre d'un contrôle judiciaire, les juges ont toutefois imposé deux interdictions au champion déchu de la droite, embourbé dans ses affaires judiciaires.
La cour a estimé que "le risque de pression, de concertation ne (peut) pas être totalement écarté" sur ses co-prévenus mais surtout sur "un certain nombre de témoins-clés", comme les ex-dignitaires du régime Kadhafi disséminés à travers le monde, et lui a interdit tout voyage à l'étranger.
De manière plus inattendue, la justice a aussi imposé une "interdiction de contact" élargie avec de hauts responsables de la justice française, notamment le garde des Sceaux Gérald Darmanin, constatant sa "capacité à actionner différents services de l’Etat" en tant qu'ex-président.
Le 29 octobre, Nicolas Sarkozy avait reçu la visite à la prison de la Santé du ministre, une entrevue qui a suscité des critiques, notamment de magistrats. Dans une rare prise de position, le plus haut procureur de France, Rémy Heitz, y avait vu un "risque d'obstacle à la sérénité" et donc "d'atteinte à l'indépendance des magistrats" avant le procès en appel.
Contacté par l'AFP, l'entourage de M. Darmanin a assuré que "le garde des Sceaux respecte toujours les décisions de justice".
"Un cauchemar"
Lors de l'examen de sa requête dans la matinée, le parquet général avait requis la sortie de prison sous contrôle judiciaire de l'ex-chef de l'Etat, jugeant que "ces garanties de représentation en justice sont rarement réunies à un tel niveau".
Sur les trois personnes détenues à l'issue du jugement de première instance dans le procès libyen, la justice a donc libéré Nicolas Sarkozy et l'ex-banquier Wahib Nacer, mais a maintenu en détention l'intermédiaire Alexandre Djouhri, arguant un risque de fuite et de pressions sur des protagonistes de l'affaire.
Le 25 septembre, le tribunal correctionnel de Paris a reconnu Nicolas Sarkozy coupable d'avoir sciemment laissé ses collaborateurs démarcher la Libye de Mouammar Kadhafi pour solliciter un financement occulte de sa campagne présidentielle victorieuse de 2007.
Le tribunal l'a condamné à cinq ans de prison ferme avec un mandat de dépôt assorti d'une exécution provisoire, entraînant son incarcération malgré son appel.
Nicolas Sarkozy a été incarcéré un peu moins d'un mois après sa condamnation. Cette détention inédite pour un ex-président de la République a suscité de vifs débats. Il s'agit aussi d'une première dans l'Union européenne, où aucun ancien chef d'Etat n'a connu l'emprisonnement.
"Je veux rendre hommage au personnel pénitentiaire qui a été d'une humanité exceptionnelle et qui a rendu ce cauchemar, parce que c'est un cauchemar, supportable", a déclaré à l'audience Nicolas Sarkozy, vêtu d'une veste bleu foncé, pull et chemise, apparaissant à l'écran dans une salle aux murs blancs avec deux de ses avocats.
"Je me bats pour que la vérité triomphe", a encore dit l'ancien président, fustigeant "l'idée folle" qu'il soit allé solliciter un financement de campagne auprès du dictateur libyen.
Les dates précises du procès en appel, qui n'ont pas encore été officiellement annoncées, devraient être communiquées aux avocats jeudi, ont indiqué à l'AFP des sources proches du dossier.








